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Arbouse Recordings – Interview

ARBOUSE RECORDINGS

Cyril Caucat est de ces artisans discrets qui sortent des disques sans faire de vague… Un vrai "clandestin" qui a fondé son label, Arbouse Recordings, autour d’une philosophie personnelle critique à l’égard de la société du spectacle. Depuis une petite dizaine d’années, ce label aveyronnais édite des disques passionnants pas toujours faciles d’accès mais sans barrière de genres. Si des groupes comme Acetate Zero ou Thousand&Bramier sont un peu l’arbre qui cache le maquis, cette interview est l’occasion de s’y aventurer pleinement pour, peut-être, entrer en résistance à notre tour…

Comment t’est venue l’idée de créer ce label, pour quelles raisons  ?
Il n’y a pas de raisons précises. Cela tient à la fois sans doute à des rencontres, à une époque et à un projet qui m’animait secrètement depuis longtemps.
Actif depuis longtemps dans le domaine musical, plus particulièrement dans le fanzinat et l’organisation de concerts, j’ai fait la connaissance d’un artiste (Eglantine), qui fut sans doute l’élément déclencheur et déterminant. L’idée me trottait dans la tête depuis un moment déjà : mettre sur pied un espace de création personnel, dont je pourrais en concevoir entièrement l’esthétique (sonore, graphique, conceptuelle…). En 1999, j’ai décidé de me lancer dans cette aventure, sans savoir où j’allais et pour combien de temps.
 

Cyril Caucat

En quoi est-ce un label engagé ? Autrement dit quelle est votre philosophie et quel est le rôle de l’ouvrage d’Alain Caucat dans tout ça ?
Je ne sais pas si c’est un label engagé. C’est en tout cas un label avec un propos singulier, un discours, qui s’est tissé au fil du temps. Une philosophie sans doute, qui s’est construite au gré des rencontres, des histoires et des moments vécus. C’est aujourd’hui un agrégat d’aspirations, d’envies et d’intentions.
Au départ il s’agissait comme par nécessité d’un exutoire personnel, puis peu à peu celui-ci s’est transformé en creuset d’idées. Ce qui m’animait jusque-là c’était d’essayer de faire quelque chose qui me ressemble, qui soit le prolongement de ma pensée, quelque chose qui invite à la résistance culturelle, qui participe (à son échelle) à la lutte contre le nivellement de l’esprit, de la pensée, l’uniformisation.
Le label ne suffisait pas, j’ai décidé de mettre sur pied Arbouse éditions (édition traditionnelle) pour creuser le sillon.
Le livre d’Alain Caucat est un peu la pierre fondatrice d’Arbouse Editions et de sa collection "Les Clandestins". C’est aussi un opuscule en forme d’état des lieux, l’auteur y dresse un tableau sombre de notre monde et invite le lecteur à "résister", mais de façon clandestine, face à l’industrie industrielle oppressante, aliénante.
Pour répondre à ta question, ce livre illustre et explique la démarche d’Arbouse Recordings en effet. Il met en exergue et traduit notre positionnement (par rapport aux artistes, au label). Un deuxième volet va bientôt voir le jour, une nouvelle publication qui enfoncera le clou, fera des propositions et surtout annoncera un mouvement en plein balbutiement : le mouvement des clandestins, sorte d’organisation obscure et pleine de dérision (on joue).

La Révocation de la pensée

Quels sont les liens entre Arbouse Recordings, Arbouse Editions et Arbouse Médiations ? Pourquoi "combattre" sur trois fronts à la fois ?
Les deux dernières entités sont récentes, j’ai expliqué un peu plus haut le pourquoi de la création d’Arbouse Editions et le lien avec Arbouse Recordings. Pour Arbouse Médiations, cela s’inscrit à la fois dans un parcours professionnel qui lui-même sans doute s’inscrit dans un parcours de vie. Je suis éducateur spécialisé dans la vie de tous les jours. J’essaye dans la mesure du possible dans le cadre de mon travail d’utiliser des supports à la relation (la base de ce travail). La médiation est un moyen incontournable pour créer des espaces, trianguler la relation. Elle est sans doute aussi le moyen détourné de mettre de la distance avec le quotidien, elle est parfois un prétexte pour approfondir ou révéler… La médiation c’est vaste.
Quoi qu’il en soit, Arbouse Médiations est le trait d’union entre ma passion pour la musique et mon métier… Avec Arbouse Médiations je rejoins quelque part, également, mon propos avec le label ou l’édition. Il s’agit pour moi d’aider ceux avec qui je suis en relation dans le cadre d’un atelier, d’essayer de participer à leur émancipation intellectuelle. Je m’évertue dans mon travail d’éducateur et avec celui d’Arbouse Médiations d’aider les personnes avec qui je suis en « relation » à être acteur, à se mettre en jeu (en je), à ne plus de se contenter d’être un simple spectateur. Je travaille souvent avec des adolescents. On sait que c’est une période délicate, de remaniement, dit-on. Mon travail consiste souvent à participer à leur structuration personnelle, en jonglant à la fois entre normalisation et anticonformisme, un exercice d’équilibriste, que la médiation permet souvent de rendre plus efficace, moins contraignant, parfois plus ludique. Etre eux-mêmes, avant d’être tous les autres, voilà mes aspirations avec Arbouse Médiations. Le refus du spectacle, du fétichisme de la marchandise (de la culture, de la musique, de Marx à Adorno en passant par Debord) : tout un programme !

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