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Disques

The Antlers – Burst Apart

The Antlers - Burst Apart

Malaise, distance, évitement se partageaient le premier album de The Antlers, rempli de berceuses blanches comme des suaires. L’électricité de cet « Hospice« , franchement plus facile à admirer qu’à aimer, sentait l’électrocution et le pourrissement, une sorte de « Magic & Loss » qu’auraient bredouillé des Arcade Fire saoulés à l’éther. Bien des choses mais pas folichon.

« Burst Apart » est une véritable révolution de velours. Fini le son spartiate et chiche évoquant des pièces monochromées à mort diffuse. Plus de raideur, de la rondeur ! Comme tout le monde cette année, The Antlers découvrent les vertus d’un certain soft-rock eighties qu’ils tirent heureusement vers l’orchestral allégorique. L’idéal de « Burst Apart », c’est peut-être Roxy Music en smoking à paillettes jouant « Avalon » dans la salle de bal du Titanic. Suave, grandiose, un poil rombière sur les bords. Mais condamné, à l’image d’une fin de disque « La Boum » pour sexagénaires emperlées : « Corsicana », ballade hypothermique avec vapeurs de synthés, et « Pulling the Dog To Sleep », slow patapouf à guitare chantilly. Hormis ces erreurs mineures, le disque est somptueux et d’autant plus qu’il est sur le fil du rasoir. « French Exit » parvient à fondre des éléments disparates tous potentiellement douteux (basse disco-Végas, chœurs angélisés, nuages de trompettes) en un résultat bouleversant et curieusement décalqué sur « Le Sens » de Dominique A. (merci à l’amie très chère qui a découvert cet hommage redoublé dans le titre). On pense également aux Wild Beasts sur les morceaux à dynamique pop (« I Don’t Want Love », « Every night… »), mais Peter Silberman dépasse sans effort ces modèles sur un « Rolled Together », irradiant de soul et probable chef-d’œuvre du disque. Car derrière l’habillage, superbe, il y a de l’anthracite, du charbon goulu qui descend jusqu’aux amygdales. « Parentheses » grogne des guitares sur un loop de batteries très Ruby, circa 1996 (ou approchant). Et le souvenir trip-hop se précise avec « No Widows », à la fois cajoleur et sinistre. C’est – avant l’envoi – le moment de parler d’un détail sonore point du tout easy-listening : ce bruit d’hélices ou d’élytres, à la fin de « French Exit », qui rappelle les machines à écrire anales et coléoptères du « Festin Nu » version Cronenberg, crissement métallique qui resurgit sous la ligne de flottaison de plusieurs morceaux. Ne pas croire, donc, que « Burst Apart » est un bonbon rose et doré, mais plutôt de la soie qui cache la rocaille. Les âmes noires s’y contempleront en perdant leurs contours.

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