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Disques

Nicholas Krgovich – OUCH

Nicholas Krgovich - OUCH

Au rayon petit cœur de beurre, Nicholas Krgovich se pose là. On le retrouve encore en pleine déconfiture amoureuse et il nous en pond des tartines avec une voix plus trainante que jamais, à la limite de la psalmodie. « OUCH » est donc un album de fond de gouffre, écrit et enregistré presque en mode automatique, piquant et picorant des samples de batterie chez son ami Owen Ashworth de Casiotone for the painfully alone, un autre as de la gaudriole. C’est dire si on se marre.

On ne l’attendait pas du tout, cet album sorti en fin d’année dernière (on devrait mieux suivre nos micro-héros). On était resté sur le lumineux « In an Open Field », en pleine lune de miel musicale avec notre petit Nicholas et on se retrouve à le ramasser à la petite cuillère (et nous à la ramasse pour rattraper le retard). L’album est à l’avenant, fait de petits débris, de bribes pêchées çà et là dans sa déjà pléthorique discographie et dans ses marottes, qui sont aussi les nôtres. On est souvent sur une architecture hyper simple, très monotone et qui opère un décollage en plusieurs strates comme avec « Hinoki », qui prend de la hauteur passée la phrase killer « Oh I wish I was dead », avec de la pedal steel sur un air de r’n’b. « Spa » et « Guilt » écopent de brillances de timbres, restes de « In an Open Field ». Sur « Goofy », terrain archi-connu, on retrouve les guitares hispanisantes de Jonathan Richman et toute la mélancolie du personnage période « I’m So Confused ». Quant à « Lido », c’est toute l’expérience de Krgovich, claviers au sein du groupe live Mount Eeerie, période emo-metal lo-fi, qui ressort. Comme on le voit, le spectre est large.

On aime aussi les chœurs féminins anti-Motown et pourtant à craquer sur « Belief » (« it has been a fucked-up winter. And a fucked-up spring ») ou « Rejection ». Et puis aussi tous ces petits arrangements, une guitare criarde par-là, un piano aigu par ici, toujours dans l’ordre de la touche très minimale parce qu’on sait qu’un petit rien suffit généralement à nous remettre d’aplomb en cas de grisou.

Et si Nicholas Krgovich reste le meilleur ambassadeur du Canada indé, ici en promotion de l’architecte compatriote Arthur Erikson (la très belle couverture, portrait de l’artiste dans la Baldwin House, qui justifie amplement l’achat du LP), il est encore une fois, et sans doute plus que jamais, le digne successeur de Jens Lekman (When I said I wanted to be your « Dog »), en moins coincé des fesses (« October », pourtant vraiment laid-back). Et ça ne surprendra (ou ne devrait surprendre) personne que Krgovich reprenne Ariana Grande (« Thank u, next »). Hors album mais tellement bon, qu’on ne résiste pas à l’envie de vous coller le clip :

« OUCH » est le pendant mineur de « In an Open Field » sorti un an plus tôt et, une fois encore, on admire le sens de l’à-propos, l’art de coller autant à ses aspirations fluctuantes et la facilité à engranger œuvrettes touchantes et chefs-d’œuvre d’un petit génie sensible et (é)mouvant.

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