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Disques

Tanlines – Mixed Emotions

Tanlines - Mixed Emotions

Avec son premier album « Mixed Emotions », Tanlines signe un disque bien dans l’air du temps, un parfait artefact de son époque. Le CV du duo est impeccable, jugez-en plutôt. Adresse ? Greenpoint, quartier en voie de « hipsterisation » de Brooklyn. Compte Twitter ? Alimenté à flux tendu, comme il se doit. Expérience professionnelle ? Des remix pour Telepathe, Au Revoir Simone ou Memory Tapes, un split-single avec Salem. Formation ? En vrac, de la production pour !!! ou Radio 4, un groupe précédent éphémère mais culte à New York (Professor Murder, dans la lignée punk-funk des deux précités), un autre assez réputé (Don Caballero), des premières parties de Julian Casablancas… Jesse Cohen et Eric Emm ne sont donc pas vraiment des perdreaux de l’année, et bien qu’enregistré dans des conditions « do it yourself », leur disque est un véritable travail de professionnels maturé pendant plusieurs mois, voire plusieurs années.

Au siècle dernier, on se serait peut-être étonné qu’un album aussi calibré (morceaux aux titres courts et simples, à la durée radiophonique, aux sonorités agressant rarement l’oreille) sorte chez Matador, longtemps refuge de groupes bruyants et déviants. Mais cela fait bien longtemps que les frontières entre « indie » et « mainstream » se sont brouillées, pour le meilleur et pour le pire. Si « All of Me » (illustré par un clip malin, absurde et minimaliste) s’impose d’emblée comme le morceau le plus tubesque, avec ses influences 80’s intelligemment digérées et son refrain imparable, les onze autres ne sont pas en reste. L’ensemble est homogène, mais chaque titre réussit à se dégager de la masse par un petit gimmick : nappes ambient sur « Abby », probable clin d’oeil à « I Know There’s an Answer » des Beach Boys sur « Lost Somewhere », tempo métronomique et son légèrement saturé sur « Green Grass » et « Rain Delay », pouvant rappeler Echoboy (pour ceux qui s’en souviennent) ou The Big Pink.

La voix limitée mais plutôt engageante d’Eric Emm recouvre l’ensemble d’un léger voile de mélancolie. Plus que de véritables inventeurs de formes, les Tanlines s’avèrent de compétents affineurs d’éléments plus ou moins nobles : de la dance pour auto-tamponneuses, de la synthpop des débuts de MTV, des rythmiques mêlant acoustique et électronique, de l’Afrique vue derrière la vitre du bus climatisé, façon Vampire Weekend (« Yes Way », « Laughing », « Cactus »). « Mixed Emotions » est un bon disque, d’une efficacité immédiate mais résistant aux écoutes répétées, auquel il manque sans doute quelques aspérités pour être un grand disque. Bien de son époque, donc.

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