La troisième caractéristique marquante est, en fait, la plus essentielle : elle est que, tout du moins sur sa première moitié, la plus personnelle, « EverLasting Money » soutient presque la comparaison avec le bijou qu’A-Wax avait sorti l’an passé, « Pullin’ Strings ». On y retrouve le même ton dépressif, souligné par les rythmes lents, les sons nimbés et les ambiances atmosphériques du cloud rap, par des extraits de chants féminins éthérés, par quelques refrains chantonnés par le rappeur, voire par un usage parcimonieux de l‘autotune, sur « Smoke Alone ».

Le rappeur, on le sait, n’a pas toujours eu une vie facile. Notamment, il fut confronté trop tôt à la violence et à la prison. C’est d’ailleurs cette expérience qu’il relate dès le second titre « Tried as an Adult » : sa confrontation dès l’âge de 16 ans à une dureté réservée en principe aux adultes. C’est donc toujours la même déprime qui imprègne ses titres. Il s’y exprime un sentiment de résignation, une sensation de solitude (« Smoke Alone »). A-Wax choisit de nous dévoiler l’envers du décor glamour de la criminalité et du deal de drogue, sur ces merveilles de mélancolie que sont par exemple les notables « Never Saw It » et « No Vacancy ».

Avec la seconde partie, toutefois, on part dans d’autres directions, avec les chants féminins soyeux de « Coulda Been », les sirènes et le minimalisme sautillant de « Hunnid Nights », les chœurs majestueux de « Money Printer », le gangsta rap m’as-tu-vu de « Residence » et l’étrange « It’s Nuthin' » conclusif, avec MaryAnn. Même si les regrets et la dépression sont toujours à portée de vue, cette moitié, invités obligent, n’a plus l’homogénéité de la première. Elle compte cependant d’autres raisons de s’intéresser à ce nouvel album qui, s’il est loin d’être la réussite absolue qu’avait été « Pullin’ Strings » en 2014, confirme une fois encore qu’A-Wax pourrait bien être, au cœur de la décennie 2010, le plus grand des rappeurs méconnus.