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Disques

Jeremy Jay – Splash

JEREMY JAY – Splash
(K-records / Differ-Ant) [site] – acheter ce disque

JEREMIE JAY - SplashSi pour une quelconque raison absurde (donner une accroche à une chronique de disque par exemple), on devait comparer Jeremy Jay à un animal, il serait à mon avis tout indiqué de choisir l’anguille. Pas tant pour le physique longiligne du dandy yankee que pour les revers insaisissables de sa musique, qui glisse avec la plus grande facilité d’une référence à une autre. Avec « Slow Dance », son précédent album, je pensais avoir découvert un digne successeur de Felt en la personne de cet élégant maniéré, fleurant bon l’androgénie. Les premières secondes de « Splash » (tiens, d’ailleurs…) plongent d’emblée dans des eaux bien différentes et m’évoquent très étonnamment les guitares acérées de Neil Young. Electrique, l’anguille l’est certainement sur ce nouveau disque, mais pas au point de raviver les incendies de « Ragged Glory » ou « Mirrorball » allumés par le doyen canadien. Son ombre n’est que passagère et cède rapidement la place à d’autres figures tutélaires, bien plus en phase avec la personnalité du jeune homme. On pourra citer pêle-mêle Morrissey, pour la posture vocale et ses élans de préciosité, ou Jonathan Richman, pour le côté faussement slacker, nettement plus direct, dont Jay se réclame ici (lui qui a voulu faire un album à la croisée des chemins entre Pavement, Sonic Youth et Siouxsie Sioux). On pourra même aller chercher dans un registre beaucoup plus crooner (Elvis, Gene Vincent ?) l’étiquette qui conviendra le mieux à ce jeune homme bien facétieux, mais on n’arrivera jamais à la coller complètement. Sans aucune fioriture, sans aucune complaisance excessive, même lorsqu’il a mis le doigt sur un tube (« Just Dial my Number », petite sucrerie éphémère), « Splash » est d’une efficacité et d’une économie imbattables. On croise en moins d’une demi-heure des chansons d’envergures et textures variables, on s’égare presque du côté chez mièvre, par instants (« A Silver of a Chance », « Someday Somewhere? ») avant d’être projeté dans de purs moments de grâce (« This is Our Time »), dont on ne parvient pas à comprendre pourquoi et comment il peuvent tant émouvoir, avec si peu de moyens et un matériau si galvaudé. Tout glisse pourtant à merveille et semble exécuté avec une désinvolture insolente. Au bout du compte, on n’a pas grand-chose à dire sur un disque aussi compact et maîtrisé, boursouflé de la prétention de son auteur bien sûr, mais qu’importe s’il en a les moyens. On est simplement pressé d’entendre le chapitre suivant, anguille de conclusion.

Jean-Charles Dufeu

As You Look Over the City 

Just Dial My Number
Splash
It Happened Before Our Time
A Silver of A Chance
Hologram Feather
This is Our Time
Someday Somewhere
Why is this Feeling So Strong

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