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Disques

Sufjan Stevens – Carrie & Lowell

 Sufjan Stevens - Carrie & Lowell

Fini le baroque, Sufjan Stevens revient à la quintessence de son talent ; celle que l’on apercevait dans les plus discrets recoins de ses précédents albums. Derrière les constructions alambiquées de « Illinois » ou les excentricités de « The Age of Adz », on revenait, plus souvent qu’à son tour, aux morceaux les plus sobres (« John Wayne Gacy Jr », ou « Futile Devices », pour ne citer que ceux-là), dont on chérissait la douce tristesse parfois davantage que le foisonnement des arrangements pourtant géniaux du Michiganais. Dans une démarche résolument introspective, Sufjan comble ici l’auditeur : avec « Carrie & Lowell », sans doute son album le plus personnel, il retombe en enfance, avec l’histoire de sa mère et de son beau-père ; il va chercher aussi dans des souvenirs plus récents, notamment la mort, en 2012, de celle-ci, et nous touche avec une grâce de tous les instants. C’est beau comme un soir d’hiver, pur comme des chants d’innocence et d’expérience (avec la même ferveur religieuse que chez Blake, même si le mysticisme des précédents albums laisse souvent la place à des épisodes autobiographiques plus triviaux – comme cet oubli, par la mère, du petit Sufjan au vidéo-club).

Arpèges souples, mélodies doucement imparables, voix feutrée, superbe, qui tourne parfois au falsetto : on se rapproche par moments, dans l’ambiance sonore suspendue, de Simon & Garfunkel ou des Great Lake Swimmers. Et la présence de Laura Veirs (au chant), entre autres invités mûrement choisis, participe aussi de cette ambiance entre chien et loup, à la mélancolie tenace.

Néanmoins Sufjan ne se dépare que rarement complètement de sa propension à laisser se déployer, subtilement, presque insidieusement, les arrangements, et « Carrie & Lowell », au fil des réécoutes, tient toutes ses promesses : celles offertes par un album de confidences susurrées, dans une belle tradition de folk intimiste, mais aussi l’oeuvre d’un orfèvre qui maîtrise de mieux en mieux son sujet, et trouve ici la mesure de son art.

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