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Disques

Tame Impala – Currents

 Tame Impala - Currents

Le monde de Kevin Parker est un continent.
Psychedelia antipode. Pop australe hypnotique.
One-man band. Eminence grise.
Après « Innerspeaker » et « Lonerism », on attendait Tame Impala au tournant : « Currents » tient (presque) toutes ses promesses. « Let It Happen », single glorieux, ouvre les festivités. « Riff un peu famélique », entendis-je ici ou là ? Ce beat obstiné et un luxe d’arrangements (guitares et synthés en parade nuptiale) vous emmènent illico presto dans le métamonde de Parker, et constituent une longue plage inaugurale qui sonne comme un manifeste : veni, vedi, vici : j’ai joui, j’ai vu, j’ai vaincu. Le break lysergique qui intervient à mi-parcours semble être un blocus pour mieux rebondir. Sans parler de cette coda digne de RAM (celui des Daft). Les Beatles de 1967 peuplent nombre des compositions de « Currents ». Du velours.
On est avec lui sur les plages de Perth (Australie).

Ne pas se fier à la minute trente un peu mégalo, cette musique est généreuse. L’homme a voyagé, il semble amoureux : écoutez plutôt ce mille-feuilles de synthés. On perfore la roche entre sédiments 60’s et couches 80’s pour se retrouver en 2015, tel un Kevin in Wonderland.
1+1 = 3, l’hypothèse se vérifie : on navigue dans cet univers hybride, très 10’s pour le coup. Dans la grande marmite contemporaine du recyclage, Kevin Parker est passé maître queux.
Les angoisses affleurent mais on est quand même dans un album hyper amniotique (permanence de l’écho, le studio comme un havre doux et humide) ; inutile de sortir le pop corn, on n’est pas ici dans un feelgood movie mais la pastille « Nangs » le confirme, par exemple : on nage entre beach drumming et bassline océanique soft porn.
Une quête, mais laquelle ?
Néanmoins, et malgré l’Impaleak assumé  (5 morceaux en streaming !) et les  rumeurs de samples illégaux, cet album est une forme de bonheur.
Poursuivons plutôt l’examen du disque, miraculeux à ses heures. Et parmi les moments forts, citons « The Moment » justement, la vraie porte d’entrée : on y retrouve l’empreinte « Lonerism » avec synthés festifs et basses ondulantes à la clef, typique 3e morceau de LP, assorti d’un panoramique efficace à la fin pour auditoire sous substances.
Ou encore « Yes I’m Changing » :  les roulements de batterie perturbent le voyage des méduses vers la Micronésie : peut-être le meilleur morceau de l’album, avec sa superbe intro embrumée, son clavecin des sables, et sa structure intuitive.
Puis vient la pièce de résistance, « Eventually » : le gros riff stadium rock, l’espace instrumental et l’élégie lennonienne donnent une heureuse équation (la voix de Parker rappelle volontiers celle de John, période Dakota).
D’autres titres marquent les esprits : « The Less I Know » et son intro géniale façon ABBA – un tube ! Un titre inspiré, amoureux, doté d’une bassline renversante et de mélodies en canon sur le final – on nage vraiment dans les 80’s.
Mentionnons aussi « Disciples », l’un des plus catchy parmi les extraits en ligne avant la sortie. Du pur Parker, court et efficace.
« Cause I’m A Man » et sa belle intro rêveuse, ses couplets narratifs de haute volée, son pré-refrain élégant et son refrain tubesque, assorti du clip Muppets ici :

Et s’il n’en reste qu’un :  « Love Paranoia » avec sa pulsation à la fois amoureuse et parano, comme une confession sur son lit d’orgue et de synthés : très belle chanson avec solo pour rire à la fin.
Nous aurions pu ici détailler chaque titre car ce disque s’écoute par vignettes, comme on lit une BD.
Après les ateliers sorcellerie en studio, Parker et ses fantassins (dont Julien Barbagallo : Aquaserge, ex-Tahiti 80) vont défendre ce brillant troisième album en tournée planétaire.

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