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Sunn O))) – Monoliths and Dimensions

SUNN O))) – Monoliths And Dimensions
(Southern Lord / Differ-Ant) [site] – acheter ce disque

SUNN O))) - Monoliths And DimensionsLorsque Greg Anderson et Stephen O’Malley se sont un jour amusés à pousser leurs amplis Sunn à fond pour en faire sortir de terrifiantes basses, ils ne se doutaient pas un instant que leur side-project deviendrait une des aventures musicales les plus excitantes de ces dix dernières années.
Avec ce qui n’était qu’un hommage, un peu informel, au monumental album d’Earth "2 : Special Low-Frequency Version", l’infernal duo en est aujourd’hui à son septième album, peut être le plus attendu.
Après le terrifiant "Black One", qu’on pourrait qualifier de disque de post-black-metal, ce "Monoliths and Dimensions" éloigne Sunn O))) encore un peu plus de ses racines métal.
Comme à chaque fois, le duo est bien entouré, mais là la liste des invités est proprement hallucinante, en tout cas elle en dit long sur les ambitions du groupe. En plus des fidèles que sont Oren Ambarchi, Rex Ritter et Attila Csihar, on trouve Julian Priester, tromboniste et ancien collaborateur de John Coltrane et de Sun Ra, Stuart Dempster, membre du Deep Listening Band de Pauline Oliveros, un choeur féminin, la tête brûlée d’ Earth, Dylan Carlson, celui par qui tout est arrivé – j’arrête car la liste est vraiment longue.

Rassurez-vous (?), malgré ces nouveaux apports, Sunn O))) demeure le groupe le plus lourd qui soit !
Un constat qui s’impose dès les premières secondes d’"Aghartha", où les monumentales guitares n’en finissent plus de creuser la terre à la recherche de ce fameux royaume souterrain popularisé au dix-neuvième siècle par l’utopiste français Alexandre Saint-Yves d’Alveydre. Une fois le royaume d’Aghartha atteint, après dix minutes de labourage sonore, la musique se métamorphose en de longs drones de cordes, de souffles rauques de cuivres pour finir dans un soupir maléfique d’Attila Csihar. Une entrée en matière glaçante qui annonce l’évolution assez étonnante que le duo a apportée à sa musique.
Sur "Big Church" c’est un choeur féminin qui débute le morceau. Plutôt une messe, pour quatre guitares, deux choeurs (masculins et féminins) et percussions métalliques. Un morceau assez grandiloquent, très théâtral, d’une lenteur terrifiante qui donne l’impression d’une rencontre entre Arvo Pärt et le plus sombre des groupes de métal.
Puis, Sunn O))) nous enfonce définitivement au fin fond des ténèbres avec "Hunting & Gathering", avec ses riffs toujours plus lourds et son chant démoniaque – tiens Attila Csihar s’est réveillé – le tout puissamment accompagné par l’ensemble de cuivres très présent tout au long de l’album.
Jusqu’ici rien de nouveau, me direz-vous ! Et bien si, car derrière cette déferlante de puissance primitive et la brutalité des ses riffs, la musique du groupe se pare d’une multitude de nuances avec l’utilisation d’une instrumentation inédite (cordes, cuivres, bois) dont chaque son est longuement étiré pour en faire sortir la fondamentale puissance. Une approche inspirée à Stephen O’Malley après une conversation avec Iancu Dumitrescu, compositeur roumain de musique spectrale. C’est plutôt bien trouvé, car la musique du groupe n’a jamais été aussi puissante, profonde et surtout contrastée que sur ces trois morceaux qui font de "Monoliths and Dimensions" un des disques les plus aboutis de Sunn O))), qui devient pour le coup le premier groupe de métal spectral !
Mais c’est sur le sublime "Alice", morceau en hommage à Alice Coltrane, que le groupe prend une dimension vraiment inédite.
Sur ce morceau tout en flottements, les guitares se font plus claires et répètent les mêmes accords désolés, accompagnées par une section de cuivres plus réduite et au phrasé tout aussi minimaliste. Après dix minutes d’une longue chute à la grâce folle, on s’échoue tout en douceur sur un tapis moelleux de synthés, bercé aux sons d’un trombone, d’une clarinette et d’une harpe.
Et oui, Sunn O))) parvient à nous émouvoir, il nous ferait presque pleurer tant le final aérien de "Monoliths and Dimensions" est empreint de l’éternelle beauté d’Alice Coltrane. Quelle surprise !

Cyril Lacaud

Aghartha
Big Church
Hunting & Gathering (Cydonia)
Alice

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