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Festival Soy (Nantes) – rencontre avec les programmateurs

Déjà 12 ans qu’à l’automne, la ville de Nantes vibre au rythme du meilleur de la musique indépendante grâce à SOY. Alex Labbé et Pierre Templé, les deux programmateurs de ce festival organisé par des passionnés, reviennent sur cette aventure quelques jours avant le lancement d’une édition qui s’annonce une fois de plus terriblement excitante. Sebadoh, Lee Ranaldo, Ought, Perfect Pussy, Son Lux, James Yorkston ou Colin Stetson comptent parmi la vingtaine d’artistes invités à se produire dans des lieux nantais divers et variés cette année…

Affiche Soy

La dernière édition du festival – très réussie – s’est terminée dans le rouge financièrement. L’économie d’un festival comme le vôtre est-elle fragile ? Vous fonctionnez comment ?

Alex : Nous finançons le festival de plusieurs manières. Subventions de la Mairie, partenariats, mécénat et billetterie. L’économie du festival est fragile car l’inflation est présente, au niveau artistique en particulier. Tout déficit doit être assumé par l’association et ses membres, notre banque refusant que notre compte soit à découvert.

Pierre : Nous sommes tous bénévoles au sein de l’association. Notre taux d’autofinancement est de 70% environ. Il faut jongler entre nos envies artistiques et la réalité technique et financière du festival.

C’est déjà la 12ème édition de SOY. Comment l’aventure a-t-elle démarré ?

Alex : Autour d’une table, avec Pierre et deux amies. Nous n’avions plus le temps d’organiser de concerts à l’année et avons décidé de concentrer notre activité sur un festival. Ça a été le début d’une dynamique assez forte puisque l’activité concert ne s’est finalement pas réduite. L’association s’est vraiment développée à cette période.

Pierre : Le hasard a aussi joué un rôle. On a eu deux propositions de concerts qu’on tenait vraiment à faire, à l’époque, en 2003. Why ? et Matt Elliot, sur deux dates qui se suivaient. On avait déjà monté une sorte de pré-SOY deux ans plus tôt avec Purr, Pull, My Own et Billy Mahonie, on était jeunes et fous et on s’était bien plantés financièrement. L’envie de remonter un festival mieux organisé était là.

La musique indé à SOY est envisagée dans son acception la plus large – du folk au noise, du hip hop à l’ambiant. C’est représentatif de ce que vous écoutez ? Comment décidez-vous de la programmation ?

Alex : C’est ce que nous écoutons, oui. Pierre et moi programmons de façon totalement arbitraire. Nous proposons nos coups de cœur, des nouveautés, les groupes en lesquels nous croyons.

Pierre : SOY, c’est une sorte de playlist idéale de notre année.

En 2003, vous vous imaginiez programmer un jour des artistes de la stature de Sebadoh ou Lee Ranaldo (ex-Sonic Youth), tous deux à l’affiche cette année ?

Alex : Nous voulions faire jouer Sebadoh quand l’association s’est créée, avec la naïveté qui était la nôtre à l’époque. L’idée était donc déjà là. Nous avons vite compris que nous n’étions pas armés pour le faire. C’est le cas maintenant.

Pierre : On en a rêvé dès le début, maintenant on est vieux et on a les moyens de concrétiser un peu nos rêves de jeunes…

Grizzly Bear, Tame Impala… Plusieurs groupes sont passés par chez vous quelques années (voire mois) seulement avant d’exploser. Vous en aviez conscience en les programmant ?

Alex : Tame Impala, oui. Grizzly Bear, un peu moins. Mais de toutes façons, nous les avons plus choisis pour leurs qualités artistiques que pour leur capacité d’attraction.

Pierre : On peut aussi citer Animal Collective, François & The Atlas Mountains. C’est quasiment impossible de prédire si et quand un groupe qui buzze va se transformer en tête d’affiche. Il y a des indicateurs mais ça dépend de beaucoup trop de facteurs.

En 2012, vous avez « piqué » Godspeed You! Black Emperor au Pitchfork festival qui se déroulait à peu près au même moment à Paris. Comment avez-vous réussi un tel coup ?

Alex : Il semblerait que le groupe ait préféré jouer à SOY plutôt qu’à Pitchfork, malgré son offre financière bien plus conséquente…

Pierre : Rectification. On n’a pas piqué le groupe à Pitchfork ! Notre offre était confirmée et Pitchfork a fait une offre 2,5 fois supérieure à la nôtre. Notre offre a été remise en cause mais le groupe a préféré honorer son engagement.

Le festival se déroule dans de nombreux lieux de la ville de Nantes (le lieu unique, Stereolux…), dont certains sont très surprenants (Museum d’Histoire Naturelle, Passage Sainte-Croix…). Comment s’est fait ce choix ?

Alex : Par volonté de proposer un parcours musical dans la ville, de surprendre les gens en leur proposant de voir certains lieux sous un autre angle, en les détournant de leur fonction première. L’objectif est de choisir des lieux adaptés aux musiques des artistes.

Pierre : Je pense que tous les membres de Yamoy’ (NDLR. l’asso qui organise le festival) aiment leur ville et on a envie de la faire vivre et découvrir, autrement. Ça peut sembler un peu niaiseux de dire ça, ou sonner comme une pub pour l’office du tourisme, mais c’est vrai.

Votre meilleur souvenir d’artiste présent à SOY, en tant que spectateur ?

Alex : Dirty Three

Pierre : Six Organs Of Admittance

Même question, en tant qu’organisateur – l’artiste le plus sympa quoi ?

Alex : Dur de répondre. Une pensée pour Lichens quand même, que l’on a accueilli plusieurs fois.

Pierre : Hors SOY, Cyann&Ben, on avait fait 12 entrées payantes à leur concert. Un gros ratage pour un organisateur, mais on a passé une super soirée à se marrer. On a fini au marché de Talensac au petit matin, avec galettes et muscadet. Sinon, pendant SOY, on a de la chance, on accueille beaucoup de gentils. Pour en citer quelques uns : Yo La Tengo, Lawrence English, Chris Forsyth, Richard Dawson, Gareth Dickson…

Votre pire souvenir, en tant qu’organisateur ?

Alex : L’accueil du Volume Courbe. Les frasques de certains musiciens ont largement écourté mes nuits…

Pierre : Rien de bien méchant, des égos un peu trop forts  (Mykki Blanco, Soap&Skin, Bonnie Prince Billy), ou des attitudes de « relous » (Le Volume Courbe, Turzi, Aluk Todolo).

Pour terminer, pouvez-vous me donner votre coup de cœur pour l’édition à venir (l’artiste totalement méconnu à ne pas rater) ?

Alex : Gum Takes Tooth

Pierre : Totalement méconnu peut-être pas mais… je dirais Ought !

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