Après de copieuses rééditions et une série de concerts aussi beaux qu’hypnotiques, les musiciens de Stereolab reviennent avec “Instant Holograms on Metal Film“, quinze ans après “Not Music“.
On est nombreux à avoir plusieurs fois changé d’ordre de rangement de nos disques. Faut-il en rester simplement à l’ordre alphabétique ? Si l’on trie par artiste, alors que faire des side projects ? Et si on rassemble par genre musical, où mettre Stereolab ? Classée un peu vite au rayon post-rock, la pop candide, à moins que ce soit une transe électronique ou du krautrock sous hypnose, de Laetitia Sadier et Tim Gane mérite bien évidemment plus que ça au regard d’une immense discographie qui s’est doucement imposée au public sur près de 35 ans. Les récentes rééditions luxueuses de leurs disques ont été l’occasion d’une série de concerts mémorables. Et, aussi inespéré que cela puisse paraître, le groupe est aujourd’hui de retour avec un nouvel album, “Instant Holograms on Metal Film“.
Il ne faut guère longtemps pour retrouver tous les tropes de la musique de Stereolab. “Mystical Plosives“ ouvre doucement ce nouveau disque avec une légère respiration instrumentale, avant de laisser la place à “Aerial Troubles“ où des orgues Farfisa modulent leurs vieilles ondes célestes accompagnées par la guitare Velvetienne de Tim Gane et une rythmique répétitive jusqu’à l’hypnose. La voix de Laetitia Sadier est à la fois une inspiration sereine et un engagement fort, elle chante en anglais comme en français avant de jouer quelques accords à la main gauche pour accompagner un saxophone oblique sur “Melodie Is a Wound“. Bitchin Bajas et des musiciens de Cavern of Anti-Matter sont de la partie et ce n’est sûrement pas un hasard tant leur musique fait écho à celle de Stereolab.
“Immortal Hands“ invoque les fantômes d’Ennio Morricone au détour de quelques accords mélancoliques et d’une basse souple. Une première partie qui laisse subitement place à une boîte à rythmes tropicale et un cornet bucolique pour nous faire danser dans notre salon. Plus posé, “Le Cœur et la Force“ s’aventure dans une sorte de psychédélisme kitsch et doux et c’est très beau. Un élan de délicatesse, des riffs western, beaucoup de synthétiseurs, une batterie motorik et un détour vers le soleil, Stereolab nous prend par la main avec des mélodies rétrofuturistes qui savent nous enthousiasmer par leurs belles envolées électriques où le free jazz s’invite au détour de quelques notes.
Si les paroles de Laetitia Sadier n’ont rien perdu de leur ferveur marxiste, Gilles Deleuze et Félix Guattari sont aussi évoqués sur “If You Remember I Forgot Your Dream Pt. 2“, sans oublier le simple mais parfait « J’appartiens à la Terre / Je dis non à la guerre » sur “If You Remember I Forgot Your Dream Pt. 1“, on y sent aussi une pointe d’introspection bienvenue. Nul doute que ce soupçon de spiritualité fera le plus grand bien à cette belle exigence artistique.