Les deux rappeurs, il faut le dire, ont pris leur temps pour faire mûrir ce disque. Lil Wyte l’avait annoncé dix ans plus tôt déjà, en 2004, sur son album Phinally Phamous, puis il avait précisé en 2012 que lui et Frayser Boy (qui avait rejoint entre temps son label, Wyte Music) s’étaient finalement mis au travail, avant de finalement enregistrer ce disque à l’arrache, en trois semaines. L’attente fut longue, mais elle en valait la peine, les deux hommes se complétant à merveille sur ce projet en commun, l’un avec sa voix éraillée, son ton hargneux et son flow rapide de petit Blanc énervé, l’autre avec son phrasé plus indolent et sa voix grave, chaude et lourde de Noir. Avec aussi tout juste ce qu’il faut de renfort, venu d’autres figures locales ou voisines comme MJG, Gangsta Boo, La Chat et JellyRoll.

Ensemble, les deux rappeurs et leurs invités s’adonnent avec perfection à toutes les routines du rap de thug : hymnes de club pour les brutes (« Bout to be a Fight », avec Gangsta Boo), ode à la défonce (« M.P.W.L. »), règlement de compte avec les rappeurs d’opérette (« Fake Rappers ») ou avec les haters de tout poil (« They don’t Like That »), cris de mâles en rut égarés au strip club (« Six O’Clock ») et compte-rendu sur les dangers de la jungle urbaine (« What’s Street »). Tous ces titres, déployés avec la force d’un rouleau-compresseur et ramassés sur une longueur idéale de trois petits quarts d’heure, se montrent tous d’une intensité totale, à l’exception d’une très légère perte de régime dans la seconde partie du disque.

A la fin de l’album, au cours d’une conclusion parlée, Lil Wyte précise qu’un B.A.R. 2 est envisagé pour 2015. Espérons qu’il soit aussi jubilatoire que celui-ci, et qu’il ne faille pas attendre dix années de plus avant de pouvoir l’entendre.