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Yo La Tengo – Fade

Yo La Tengo - Fade

C’est un peu comme la quête du Graal ou l’obtention de billets pour Bayreuth : ma première chronique de Yo La Tengo pour POPnews. En relisant ce qui avait déjà été (très bien) écrit par mes glorieux prédécesseurs (cf les chroniques des récents « Populars Songs » ou « I Am Not Afraid Of You And I Will Beat Your Ass »), on sent que Yo La Tengo fait partie de ces quelques groupes fédérateurs de notre petite communauté, comme les Smiths pour Les Inrocks mensuels ou le genre de groupe clivant qu’on retrouverait en bonne position de la liste au pilori pour les professionnels de la mauvaise foi tendance Gonzaï. D’ailleurs, on serait presque prêt à offrir un billet de concert à un Bester, quasi sûr que le groupe d’Hoboken, New Jersey (Eldorado à prononcer intégralement pour y rêver même s’il y a peu de chance qu’on finisse par y mettre les pieds, dans ce Valhalla-là , et pourtant assister aux concerts annuels de YLT pour Hanoucca, ça fait drôlement envie), finirait sans mal par le rallier à la cause. Bref, on ne touche pas à nos Yo La Tengo qui régulièrement nous offrent plus ou moins le même recueil de chansons, toujours le même toujours différent, que l’on retrouve ravis. Il suffit d’ailleurs de retrouver sur la pochette le nom de Greg Calbi, au mixage, pour se mettre à sourire même si le principal de ce « Fade » a été enregistré et mixé, une infidélité en forme de coquetterie, chez et par John Mc Entire. Nous sommes donc en terres connues et balisées. Alors pourquoi écouter un nouvel album de Yo la tengo ? Mais parce que c’est la grande classe, cher ami, et que le cru de cette année est fort bon ! Prenons le morceau épique de début d’album, « Ohm », du Yo la tengo plus que classique : batterie serrée, petit riff en boucle et empilements de guitares, soli en tout genre, pédales dans tous les sens, les voix de nos comparses mêlées dans un titre des plus happy sur un texte en quête de réconfort (thème de l’album). Dans ce maelström sonique, l’équilibre est parfait avec un Mc Entire impeccable, au top avec les petites percu tribales fondant à mesure que la chanson prend corps, alors que résonnent les accords de flangers.

 

Sur « Is That Enough », en revanche, l’astuce de production réside dans l’opposition entre chansonnette amoureuse, soyeuse à souhait avec ses vagues de cordes, chouettes arrangements de Jeff Parker, et un solo de guitare qui court sur tout le titre, crasseux, rêche, certainement envoyé dans un mini ampli-jouet saturé à mort.

Les détails de ce type abondent, comme l’instrument brésilien, cette saloperie dont on a oublié le nom, doublé par la guitare sur « Stupid Things ».

L’album est plus ou mois séparé en deux faces : la première plutôt uptempo, la seconde midtempo rappelant que Yo la tengo est un grand pourvoyeur de disques de sieste. Ecouter à ce titre, « Two Trains » ou se replonger au besoin dans « And Then Nothing Turned Itself Inside Out », ma porte d’entrée personnelle dans l’œuvre du trio et base d’une première conversation-rencontre-bière(s) avec Guillaume S. feu rédac chef de POPnews (à moins que ce ne soit une brouillerie au sujet de « Summer Sun »). En cette période de deuil de Lou Reed, rappelons au besoin, que Yo La Tengo restent les meilleurs descendants du Velvet (et des Feelies aussi, hein), marqués à vie, comme nous, par cet incroyable troisième album, lent et dépouillé d’artifices, inattendu de la part de furieux acharnés du son. Georgia Hubley, qu’on aime plus que tout comme Philippe Dumez, Moe Tucker moderne, qui ne glisserait jamais sur un sachet de thé en forme de peau de banane, nous ravit avec sa voix flûtée et fluette sur « Cornelia & Jane » et « Before We Run » (outro forcément géniale), contrastant élégamment avec la section de cuivres chaleureux (avec un Rob Mazurek qui passait par là).

 

Ira Kaplan, M. Hubley à la ville, conte fleurette à sa dulcinée sur « The Point of It », simplement, gentiment : « Say that we’re afraid, say the night is cold. Honey that’s ok , if we’re getting old. If We’re not so strong, if our story’s told. That’s the point of being loved ». Comme quoi, ça peut être vraiment chouette un vieux couple, même dans un groupe de rock.

On prend aussi notre quota de claviers rêveurs sur un joli tricotage de guitare folk, »I’ll be around », qui nous fait penser qu’on aimerait bien voir les enfants Kaplan/Hubley, si ça existe (une piste peut-être : la réalisatrice du clip de « Before We Run »).

 

Au rayon larsen (y en a aussi, y en a toujours), on trouve « Paddle Forward » qui ne rame pas du tout et surfe sur le meilleur du Yo La Tengo 90ies, « Electr-O-Pura » ou « I Can Hear The Heart Beating As One » en tête. D’ailleurs, dans le genre bûcheron, il n’y a que Kaplan et Mascis qui peuvent, encore, nous faire le coup du solo à rallonge, toujours épatant (si,si) et généreux en concert.

Et puis, un groupe qui place à l’intérieur de sa pochette de disque le dessin d’un enfant ayant gagné (la troisième place !) du Draw Yo La Tengo Contest, mérite plus que toute notre sympathie et notre estime. Yo La Tengo et nous, c’est Amour Eternel Sans Divorce gravé secrètement sur un arbre dans la cour de récré.

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