ELM – Sunny Scenics
(Telescopic / Poplane)
Sunny Scenics, deuxième disque de elm, sort quatre ans après un premier album double aux tonalités multiples : deux courts CDs qui révélaient plusieurs facettes du duo. Déjà, on notait chez eux un penchant pop (du moins autant qu’un texte de Duras permet des accents pop…) qui s’effaçait parfois lors de compositions plus ouvertes sur le jazz ou les musiques savantes. sunny scenics serait un disque plus "facile" : des textes avec couplets et refrains remplacent désormais les extraits de Michaux ou Pinter.
N’en déduisez pas pour autant que les compositions de elm ont délaissé toute recherche ou toute ambiguïté. "Entièrement", "massivement", "résolument", ne colleront sûrement jamais à leur musique : elle préfère s’enrichir de superpositions, disparitions, hésitations rythmées et phrasées. Difficile pour eux de se cantonner à une seule idée d’arrangement, et difficile pour nous de préférer une des pistes qu’ils explorent : textes naïfs ou alors textes qui cherchent la sonorité des syllabes anglaises ? construction en crescendo implacable ou bien arrangement tout en réserve ? et d’abord, la voix ou l’instrumentation ?
La voix peut-être ? celle d’Elodie Ozanne, la moitié chantante de elm. Une voix qui sait se faire souffle articulé, mais aussi surprendre et jouer d’un chant plus plein, complexe ; une voix qui retiendrait dès la première écoute ceux qui auraient manqué de prêter attention aux instrumentations très variées (celles de Manuel Bienvenu, seconde moitié), tout en pizz, rythmique légère, ou en harmonium et violoncelles.
Deux premiers titres très séduisants ouvrent cet album, deux titres qu’on hésite à réécouter avant de poursuivre. D’abord Home, cover de Cure : il m’aura fallu faire un détour par la voix d’Elodie O. pour découvrir avec plaisir ce morceau (la version originale se trouve sur le singe Mint Car). Puis Mexican Dogs : un arpègeage régulier (c’est presque sensuel la guitare portugaise) et un chant qui plane ou s’élance suffisent à me faire croire que si elm reprenaient Léonard Cohen, ils ne s’y prendraient pas autrement.
C’est par la suite un agréable disque qui se construit, en empruntant plusieurs directions. West Hartford plaît d’emblée par son piano entraînant, mais s’offre aussi d’aller voir ailleurs. Plus loin, Barbatruc met en place une étonnante machinerie lancinante, avec un chant à la scansion presque heurtée. Et toujours, entre précision et joliesse, la discrétion des arrangements oscille (hésite ?) entre minimalisme et vague d’émotion retenue.
Il se peut qu’à l’avenir les deux elm gagnent à s’affirmer, à choisir de pousser un peu plus avant en oubliant leur réserve; ou peut-être sauront-ils conserver la subtilité et l’équilibre de sunny scenics, qui, de sonorités plaisantes en petites touches bien trouvées, donnent à ce disque une discrète beauté de printemps naissant.
Home
Mexican Dogs
Ton Genou
West Hartford
Rassurance
Wonderland
Barbatruc
Light That Goes
K&B
The Things We Have