MOFO#4, Saint Ouen, Mains d’Oeuvres, 30 juin, 1,2 juillet
30 juin : première journée
Le moins qu’on puisse dire au sujet de Mains d’Oeuvres, c’est que cette salle est loin d’être facile d’accès. Cela dit, une fois un bon plan imprimé, une fois déjoués les petites facéties du métro estival (ha ha ha, la station Garibaldi est fermée), une fois… non plutôt deux ou trois fois le chemin demandé aux habitués, bref une fois arrivé à bon port, on ne regrette pas la difficulté du parcours. Parce que, pour le festival MO#FO, le résultat en valait largement la peine…
Dans un espèce de temple à la musique un peu confus, où, entre deux scènes, on sirote tranquillement sa bière sur l’une des innombrables banquettes mises à disposition, une tarte maison à la main, se croisent un public assez nombreux et quelques vedettes de la soirée, identifiables au badge pendant à leur cou. Arrivé malheureusement trop tard pour les Minor Majority, qui, d’après les échos que j’en ai eus, ont livré une prestation à la hauteur de leur disque (j’en déduis donc excellente), j’assiste en revanche à l’arrivée sur scène des Married Monk, que je découvre ce soir. S’ils n’ont pas tout à fait la dégaine ni l’attitude de pop-stars (je me souviendrai notamment du « Salut les Kids ! » lancé par le chanteur avant de commencer), les membres du groupe maîtrisent pourtant bien leur sujet et convainquent d’emblée avec une première chanson sonique qui revisite plus ou moins la new-wave oubliée de Marquis de Sade. La suite ne décevra pas cette première impression et le concert conservera dans le souvenir quelque chose de très original. Retour sur la scène FO où l’on avait aperçu quelques minutes auparavant les Herman Düne saluer la moitié du public et David-Ivar donner une franche accolade à Jack Lewis. C’est sur scène maintenant que ce dernier va se distinguer. En compagnie d’un (grand) bassiste et d’un (petit) guitariste très électriques, le plus barbu des frères Herman Düne prête sa voix et son jeu de batterie dynamique à Temple Temple. Ce combo punk-trash semi improvisateur se livre au jeu des fausses reprises avec une chanson qui ressemble fort à l’une de celles que Davi-Ivar et sa soeur (également présente dans le public) avaient composée, et une autre qui s’apparente trop à Jumpin’ Jack Flash pour que ce soit vraiment un hasard. Ludique et brouillon, mais plutôt énergisant. Rien à voir avec la gravité consciencieuse de Shannon Wright qu’on retrouve sur la scène MO. Au début ça ressemble un peu à un concert de Catpower (pour l’éclairage et les arrangements plus que minimalistes), en beaucoup plus consciencieux cependant : Shannon Wright au moins finit ses chansons. Et elle les finit même très bien. Qu’elle soit au piano ou à la guitare électrique, il se dégage de chacun des titres une énergie et un souffle ravageurs plus viscéraux que sur les albums. Un détonnant concentré de violence sous une carcasse d’apparence pourtant bien inoffensive. Le public est impressionné. Il y a de quoi. Après ce concert, on pouvait déjà aller dormir tranquille. En attendant, on s’attarde quand même un peu sur l’autre scène, où l’on croise Wilfried* asséner d’un air imperturbablement grave quelques chansons pop assez classiques. Malheureusement pour lui, les bribes du concert précédent ont plus d’impact que celles de celui auquel on est censé assister. Dernier retour sur la scène MO pour Lesser Lewis, le concert qu’on attendait tous (en tout cas moi). Accompagné par les trois membres d’Herman Düne (encore là !), Jack Lewis, le frère de Jeffrey, livre ses compositions loufoques et pleines d’entrain, les yeux dans le vague et les doigts sur le manche de sa basse, tandis que les deux frères et Néman s’en donnent à coeur-joie comme backing band. On a un peu l’impression d’assister à un concert des Modern Lovers. L’esprit punk ambiant côtoie à merveille l’absurdité des paroles (« The Day Neil Young Died ») et la nonchalence des mélodies. C’est un beau festival de spontanéité sauvage et de joyeuses échappées, où aucun des membres ne boude son plaisir. Le public non plus.