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Dead Fly Buchowski – Interview


 A la première écoute, on a eu un peu de mal avec le premier album de Dead Fly Buchowski, « Land of the Rough ». Un rock plutôt lourd, bluesy et psychédélique, limite bourrin parfois, avec un chanteur pas vraiment dans la retenue : pas forcément le genre de chose qu’on défend ici. Et puis, petit à petit, on s’y est fait, quitte à zapper deux ou trois morceaux flirtant avec le mauvais heavy metal. On a senti chez ce groupe basé à Glasgow (mais dont seul le chanteur est natif) un vrai potentiel, une imperméabilité bienvenue aux modes de Londres ou New York, une sincérité qui pour une fois ne dissimule pas une inspiration déficiente. Avec une certaine curiosité, on est donc allé à la rencontre de Roddy Campbell (chant) et de Tom Davis (guitare, originaire d’Irlande du Nord) dans les locaux parisiens de leur label Beggars. On a rencontré deux bons potes aux allures de grands adolescents, francs, chaleureux et diserts. Avec suffisamment de détermination, de foi en eux et en leur musique pour qu’on se dise en repartant que l’avenir pourrait bien leur appartenir.

DEAD FLY BUCHOWSKI

Roddy, contrairement aux autres membres du groupe, tu es natif de Glasgow. Est-ce que tu revendiques ton identité écossaise ?
(Roddy) Bien que j’aie un nom très écossais, je me sens avant tout britannique, tout en reconnaissant que l’Ecosse est bien distincte de l’Angleterre. Nous avons la même armée, la même monnaie, mais certaines lois sont différentes, tout comme le système éducatif… et l’accent ! Par sa géographie et son histoire, l’Ecosse est un peu à part dans le Royaume-Uni, avec une identité forte. Même si je ne me balade pas en kilt, c’est quelque chose que je ressens. En même temps, c’est un pays ouvert sur la mer, qui a donc assimilé beaucoup d’influences extérieures. Pour moi, ce qui caractérise l’Ecosse, c’est avant tout sa richesse culturelle. Edimbourg, notamment, est réputé pour ça. Il y a surtout une importante tradition musicale, qu’on retrouve aussi au Pays de Galles, en Irlande… Les gens aiment se retrouver pour chanter et boire des coups, tu baignes là-dedans dès l’enfance, c’est quelque chose de naturel.

Pouvez-vous retracer l’histoire assez longue de votre album ?
(Tom) Au départ, il s’appelait « The Land of the Rough » (« le pays des durs », une expression pour désigner l’Ecosse, ndlr), l’article a finalement disparu. Nous l’avons enregistré avec très peu d’argent, en deux jours au printemps 2003. L’album a été vraiment terminé en janvier 2004. Nous en avons tiré quelques centaines d’exemplaires, que nous avons vendus à nos concerts et envoyés à quelques maisons de disques. Nous avons reçu des réponses positives de plusieurs labels, et avons finalement choisi Beggars. L’album était déjà prêt mais il a fallu le remixer et enregistrer trois nouveaux morceaux, ce qui nous a emmenés jusqu’à la fin 2004, début 2005. Ce n’était pas une très bonne période pour sortir le premier album d’un groupe inconnu… Ils ont donc préféré le repousser au mois de mai, un peu avant les festivals d’été.
(Roddy) Le processus semble long, mais signer un contrat ne se fait pas en un jour, il y a des négociations, des points à régler et une fois que c’est fait, il faut encore attendre des mois avant que le disque sorte, pour des questions de planning. Mais nous sommes très contents de la façon dont les choses se passent. Quand nous avons enregistré la première version du disque, ce n’était pas dans l’espoir d’être signés, c’était juste pour nous. En fait, nous n’avons pas suivi les règles habituelles : plutôt que d’envoyer une démo de trois morceaux, on proposait un album complet, avec l’artwork. Ainsi, nous imposions nos vues dès le départ.

Et pourquoi Beggars ?
Personnellement, je connais bien leur catalogue. Mais nous les avons surtout choisis pour leur grande intégrité artistique. Ils ne suivent pas la dernière mode, ils soutiennent leurs artistes et leur laissent le temps de se développer. Et ils sont ouverts à divers styles.
(Tom) Avec eux, ce n’est pas « Vendez tout de suite plein de disques, décrochez des hits. » Des groupes qui marchent bien cohabitent avec d’autres plus modestes, qui profitent de leur succès.

Il y a peu de groupes actuels dont on puisse vous rapprocher, à part peut-être Queens of the Stone Age ou les Kings of Leon, voire les White Stripes. En revanche, votre son rappelle celui de formations des années 70 comme Led Zeppelin, Black Sabbath ou Hawkwind…
Nous sommes très ouverts et éclectiques, nous ne sommes pas attachés à un son en particulier. Nous jouons de façon très organique, sans nous dire que nous allons sonner comme un tel ou un tel. De toute façon, on peut toujours remonter dans le passé, jusqu’aux hommes préhistoriques qui faisaient de la musique en frappant des pierres dans les grottes ! En définitive, tout le monde puise plus ou moins aux mêmes sources. Ce sont vraiment des influences inconscientes, nous écoutons juste notre instinct.
(Roddy) Nous avons des goûts variés et des collections de disques différentes, même s’il y en a sans doute quelques-uns que nous possédons tous ! On nous compare à plein de groupes fabuleux, mais il y en a que je n’ai jamais écoutés. J’ai beaucoup de respect pour Led Zeppelin ou Black Sabbath, pourtant je n’ai aucun de leurs disques. J’ai beaucoup profité de la collection de mon frère, mais ce ne sont pas forcément des choses qui m’ont directement influencé. En fait, mes influences principales ne sont pas musicales, mais viennent plutôt de la philosophie, l’histoire ancienne et moderne, la sociologie, la psychologie… (selon leur biographie, le morceau « Ground Nero » décrit le combat de la cité de Delphes, dans l’ancienne Grèce, contre les envahisseurs celtes au IIIe siècle av. J.C. !, ndlr) Des matières que j’ai étudiées et qui m’inspirent beaucoup pour les textes. Ce qui pourrait nous rapprocher effectivement de certains artistes qui, dans les années 70, essayaient d’écrire sur des thèmes un peu plus profonds que les éternelles histoires de garçons et de filles… J’aime quand la musique fait naître une réflexion chez l’auditeur, qu’elle crée des images intéressantes, du sens. En même temps, il y a des tas de chansons géniales qui ne veulent pas dire grand-chose ! (rires)  

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