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Elysian Fields – Interview


Une sorte de boudoir, tout de velours tapissé, non pas sur les Champs-Elysées mais à deux pas de la place Pigalle : l’endroit idéal pour rencontrer au début de l’été Jennifer Charles et Oren Bloedow d’Elysian Fields, désormais couple seulement à la scène, dont le nouvel album, « Bum Raps & Love Taps », s’avère aussi séduisant que les précédents, quoique d’un abord un peu moins immédiat. A l’image de ses créateurs, à la fois chaleureux et extrêmement rigoureux et précis quand ils parlent de leur musique, affichant une hauteur de vue qu’on ne rencontre pas tous les jours chez un groupe de rock (le terme est certes un peu réducteur dans leur cas). En interviewant Elysian Fields, on ne perd donc vraiment pas son temps.

La construction du nouvel album est assez particulière. Les deux premiers morceaux sont assez accrocheurs, alors que les suivants, beaucoup plus longs et lents, parfois tortueux, demandent une écoute plus attentive.
Oren : C’est drôle que tu en parles, car on a justement évoqué le sujet dans l’interview précédente. En fait, notre album d’avant, « Dreams that Breathe Your Name », était déjà conçu comme ça : les morceaux du début étaient même encore plus « catchy » que sur le dernier, puis on retrouvait des chansons moins évidentes. Mais c’est vrai que là, on a voulu aller encore plus loin dans cette direction, ce basculement.
Jennifer : Pour moi, c’est un disque très personnel. C’est un peu comme avec une femme, qui pourrait être moi d’ailleurs. Tu es d’abord attiré par elle, tu la suis, puis tu apprends à la connaître, la relation s’approfondit, mais tu ne te rends pas compte tout de suite à quel point tu es lié à elle. C’est le même genre de cheminement que sur ce disque.
Oren : Même si les deux premières chansons ont un tempo et des accords plus accessibles, et si elles sont davantage susceptibles de passer à la radio, je ne pense pas qu’elles soient superficielles pour autant. Ce genre de morceaux correspond peut-être plus à ce que certaines personnes recherchent dans la musique : de l’énergie, du rythme, une certaine légèreté. Mais nous essayons d’offrir un spectre d’expériences plus large à ceux qui ont un rapport plus profond à la musique.

Vous semblez avoir particulièrement ralenti le tempo sur celui-ci.
Je ne suis pas certain que les nouvelles chansons soient vraiment plus lentes qu’avant. J’ai une idée très précise du type de BPM que nous utilisons, et nous restons le plus souvent dans les valeurs basses. C’est vrai que pour celui-ci, nous n’avons pas hésité à partir sur des formats plus longs et à explorer ce que je pourrais appeler… (il réfléchit) …un territoire « classique ». Après, chaque disque est plus ou moins le reflet de ce que nous sommes, de ce que nous visons au moment où nous le faisons, de ce que nous écoutons, et de là où ça nous excite d’aller.

Est-ce que vous avez davantage expérimenté avec ce nouveau disque ?
On ne raisonne pas vraiment comme ça. On n’expérimente pas en studio, on fait de la musique, c’est tout. « Expérimenter », pour moi, c’est être surpris par le résultat… On ne fonctionne pas ainsi quand on enregistre, déjà parce qu’on n’en a pas les moyens. Nous écrivons puis, quand nous avons assez de chansons, nous entrons en studio, et enfin nous mixons. Deux semaines, et c’est bon. Seule la chanson « Lame Lady of the Highways » est en quelque sorte une expérimentation. Après l’avoir enregistrée, nous nous sommes rendu compte que seule la partie centrale tenait la route. Donc nous l’avons complètement refaite, mais nous n’aimions plus autant ce passage dans la nouvelle version. Nous avons alors fait une sorte de greffe entre les deux prises. De ce point de vue, on peut considérer ce morceau comme expérimental, car d’habitude nous ne procédons pas ainsi, et nous étions surpris que la greffe prenne. Mais sur le fond, il n’y a rien de vraiment expérimental dans cette façon de faire.

Sur « Set the Grass of Fire », ton jeu de guitare évoque Hendrix. Aimerais-tu faire davantage de morceaux dans ce style-là, plus rock ?
Mais nous faisons du rock ! Personnellement, je ne ressens aucune limitation. Simplement, je ne veux pas trop donner dans un seul style.
Jennifer (regard insistant) : C’est comme faire l’amour, tu n’as pas envie de le faire d’une seule façon. Parfois ça bouge plus, d’autres fois c’est plus doux… Ce n’est pas quelque chose de trop réfléchi, on voit ce qui marche le mieux pour chaque chanson.

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