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Tricky – Knowle West Boy

TRICKY – Knowle West Boy
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TRICKY - Knowle West BoyTricky revient aux sources avec ce neuvième album, dont le nom est tiré du quartier dans lequel il a grandi à Bristol. Visiblement, le kid du trip-hop a des comptes à régler avec son enfance dans ce quartier difficile, mais on s’en doutait déjà depuis "Maxinquaye", ou simplement en lisant sa bio (père enfui, mère suicidée, un peu de prison). On serait un artiste torturé pour moins que ça, et il semble difficile d’estimer la part de thérapie et celle de flambe dans cette constance sombre qui est le fil rouge des albums, collaborations et concerts d’Adrian Thaws.
Etonnamment, l’entrée en matière est assez légère : l’intro de "Puppy Toy" nous emmène dans un piano-bar enfumé, avant de décoller avec l’arrivée d’une des nombreuses voix féminines de l’album, celle de Alex Mills, qui n’est pas sans évoquer une autre figure tutélaire des nineties novatrices, Neneh Cherry. On l’aura compris, "Knowle West Boy", loin de coller au registre paranoïaque ou agressif-dépressif qu’un tel thème pourrait engendrer, est un croisement des genres, bouillonnant, réussi, et finalement très immédiat, presque mainstream parfois. Difficile de parler encore de trip hop ici, à part peut-être sur "Joseph", ou sur "Past Mistake", tant l’album est un patchwork des différentes facettes du Tricky de ces dix dernières années – le hip hop, le ragga, la soul, le rock un peu lourd, la drum ‘n’ bass, recyclés depuis "Angels with Dirty Faces" – bref, depuis que Tricky a troqué le génie de "Pre-Millenium Tension" pour un talent d’habile producteur / mixeur de genres.
Ici, bonne surprise, on prend aussi les vieux pots pour réussir de belles recettes : la dynamique tendue de "Council Estate" évoque forcément "Brand New You’re Retro" (déjà pompé au petit dernier des Jackson Five) et le doublage de la voix féminine par celle du kid sur "Past Mistake" est repris au génial "Abbaon Fat Tracks", sur "Maxinquaye" aussi. La tension permanente inhérente au style Tricky fait le reste, et donne son unité à l’album : basses puissantes, production étoffée, morceaux courts – globalement c’est l’efficacité qui prime, et Tricky atteint le plus souvent son but, en tout cas plus souvent que sur "Blowback" par exemple, qui pourtant était conçu dans la même perspective, mais qui s’essoufflait après quelques titres. Ici, peu de répit pour l’auditeur, surtout avec des paroles comme : "In my mother’s belly and I’m starting to kick, 9 months in the womb and I’m making her sick" (sic) sur le single "Council Estate". Mais pas non plus de sensation d’étouffement : les voix féminines, très aériennes, et les deux intermèdes ragga, offrent des respirations entre les très saturés "C’mon Babe" ou "Slow" (reprise d’un tube de Kylie Minogue – re-sic).
Bref, "Knowle West Boy" ne signera pas forcément le retour de son auteur au premier plan de l’avant-garde, mais au moins son retour en forme. Tricky propose sans aucun doute son meilleur album depuis dix ans, et montre qu’il est décidément l’un des plus efficaces recycleurs de son époque.

David Dufeu

A lire également, sur Tricky :
la chronique de « Vulnerable » (2003)

Puppy Toy
Bacative
Joseph
Veronika
C’mon Baby
Council Estate
Past Mistake
Coalition
Cross to Bear
Slow
Baligaga
Far Away
School Gates

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