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Concerts

Explosions in the Sky au Bataclan, le 20 mai 2011

C’est bientôt la fin du monde – puisqu’un pasteur américain l’a dit, ça doit être vrai (l’Apocalypse n’a finalement pas eu lieu le 21 mai, Harold Camping s’étant visiblement trompé dans ses calculs, ndlr). Aller voir Explosions in the Sky semble être ce qu’il y a de mieux à faire dans de telles circonstances : ces odes à l’innocence et à la réconciliation vont restaurer la confiance, ces explosions cathartiques expulser le mal. Et les instrumentaux bucoliques constitueront la bande-originale des moments que nous nous remémorerons. Le programme du Bataclan est, ce soir-là, de circonstance ; très bien.

Explosions in the Sky

Seulement, au lieu d’une soirée peinard de fin du monde en musique, voilà qu’on se retrouve dans un Bataclan plein à ras bord. Ça piaille de toutes parts, y compris lorsque les Texans entament, en guise d’ouverture, « Yasmin the Light ». La salle se divise alors en deux camps : ceux qui ne se taisent que lorsque les flots de décibels couvrent leurs voix, et ceux qui les toisent d’un œil excédé. Ceux qui sont venus en passant, parce que ça avait l’air sympa quoi, et ceux qui sont venus en quête de montagnes russes émotionnelles.

Si l’on fait abstraction de ces querelles pour observer, malgré le bruit de fond, ce qui se passe sur scène, on est d’abord impressionné par l’intensité de ce qui s’y trame. Les cinq gaillards, si réservés quelques minutes plus tôt, se balancent comme les blés un jour de tempête ; Munaf Rayani se plie comme un roseau, n’hésite pas à jouer assis, debout, contorsionné, noyé dans le flot des riffs qu’il crée. C’est beau. Sauf qu’un voile invisible semble séparer le groupe de la salle, malgré l’émouvante déclaration d’amour au public lue par le guitariste au début du concert, dans un français approximatif. Un mur sans doute lié à la piètre qualité du son : si les déchaînements sonores (« Catastrophe and the Cure ») sont relativement efficaces, la dentelle tissée par les guitares pendant les moments de répit disparaît au profit d’un magma très quelconque. Des moments d’une puissance rare (l’épique « Last Known Surroundings », « Your Hand in Mine ») viennent pondérer cette déception diffuse ; difficile de ne pas laisser ces narrations sonores délivrer leur dose de vague à l’âme.

Explosions in the Sky

Mais tout au long du concert, je ne peux pas s’empêcher de garder à l’esprit ce que ç’aurait pu être. Ce que ç’aurait pu être, si les amplis, au lieu de cracher ce son sursaturé, s’étaient contentés de restituer les montées en tension explosives, et les riffs cristallins. Si ces épopées musicales nous avaient été présentées avec leur grâce d’origine, et non pas polluées par un son approximatif et inadapté.

C’est donc avec un mélange de bienveillance amie (« ils ont tellement bien joué, c’est pas leur faute si le son est pourri ») et d’amertume (« ce n’était que ça ? ») que je les regarde quitter la scène – les bougres, pas fourbes pour un sou, ne reviennent pas pour un rappel après nous avoir fait des adieux chaleureux sur « The Moon Is Down ».

Explosions in the Sky

Ce n’était donc que ça. Quelques moments de splendeur contre beaucoup de fuzz indésiré. Quelques pauses d’une intensité rare, au milieu d’un combat contre le brouhaha ambiant. On est peut-être un peu trop exigeant, une veille de fin du monde.

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