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The Horrors – Skying

The Horrors - Skying

La caravane d’Hannibal chemine dans les Alpes. Neige fondue, corniche escarpée, un éléphant glisse, barrit, balaie l’air de sa trompe et chute tout en bas. Avant de s’écraser pesamment, il passe en un millième de seconde par un point équidistant du ciel et de la terre. Ce point d’équilibre au milieu du vide, « Skying » l’atteint et, s’il est possible, le déploie invraisemblablement en cinquante minutes qui n’en restent pas moins soumises à la plus ployante gravité.

« A la manière de » depuis leur naissance, The Horrors a toujours été sauvé du pastiche par un goût étrange de la pompe qui amidonnait leur version du psychobilly (« Strange House ») et du post-punk tendance krautrock (« Primary Colours »). Voici leur nouvelle collection : « new-wave orchestrale » composée presque exclusivement de mid-tempos figés dans une sauce synthé à l’huile. La batterie  emplit le premier plan, mais les compositions ne progressent pas ; les nappes s’empilent les unes sur les autres, mais le plat de résistance tarde à venir. L’intro-escargot à basse bonhomme d' »Endless Blue » a beau être déniaisée d’un coup par un solo Beavis & Butthead, l’humeur ne change pas. De pataudes tentatives rock échouent tout aussi bien (« Monica Gems »), la tortue battra toujours Achille à la course.

Et pourtant, quoique irréprochablement glabre et bien mis, The Horrors n’infuse pas l’ennui massif qu’on peut éprouver à l’écoute d’Interpol ou autres moines copistes de même acabit. Inexplicablement, « Skying » n’est pas déplaisant. Est-ce son déhanché bas du cul qui berce ? La voix dramatique à faux khôl de Faris Badwan qui fait son petit effet ? Ou les réminiscences nombreuses de discophiles affirmés ? « I Can See Through You » rappelle, un rien empâté, le « O.U » de Pulp, tandis que « Dive In » indianise à la façon des Psychedelic Furs. Encore meilleur, « Wild Eyed » tutoie la suavité fatale du sublime « Keep Your Dreams » (ressortez « XTRMNTR »…!). Quant à « Still Life », c’est tout simplement l’un des morceaux les plus addictifs de l’année avec son crescendo masqué, obstiné, plastronnant entre clochettes et trompes de gloire, à l’image de « Bittersweet Symphony », tout aussi emphatique et jouissif.

« When you wake up, you will find me », y chante Badwan, très sûr de lui. C’est que The Horrors a le suspens finalement superbe. On les croyait tombés, mais ils flottent encore et claquent même comme des étendards.

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