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Disques

Nits – Malpensa

Nits - MalpensaMa découverte du vingt-cinquième album des Nits s’est faite d’une façon plutôt inhabituelle, qui plus est en 2012. C’est en effet en parcourant les bacs d’un disquaire aux goûts très sûrs (qu’il en soit ici chaleureusement remercié…) que j’ai eu connaissance de l’existence d’un nouvel opus de la formation néerlandaise. Quoi de plus paradoxal, lorsque l’on passe le plus clair de son temps à arpenter le web à la recherche de nouveautés musicales, que d’être ainsi informé d’une sortie aussi importante… Mais après tout, les Nits ont toujours pris le soin de se situer en retrait du grand cirque médiatique et leur démarche reste aujourd’hui encore incroyablement confidentielle et marginale, au regard de l’importance historique de leur discographie.

Si le groupe d’Amsterdam demeure évidemment l’une des valeurs sûres de la pop européenne, la plupart d’entre nous a pourtant fini, bon gré mal gré, par se résoudre à l’idée que ses nouveaux enregistrements ne tutoieraient sans doute plus que par intermittence l’excellence à laquelle il nous avait un temps habitués (mais quoi de plus normal au fond, après presque quatre décennies de haute exigence artistique). C’est donc avec une pointe d’appréhension que l’on découvre ce nouvel album, enregistré l’an passé entre le Piémont et les Pays-Bas, et dont la pochette est ornée d’un sobre portrait du trio.

Premier constat : une rupture de ton assez nette par rapport à la pop plutôt léchée de « Strawberry Wood » (2009) qui, jusque dans son titre, semblait prêter allégeance aux Fab Four. Moins immédiatement séduisant que son prédécesseur, « Malpensa » laisse les guitares au placard pour mieux se concentrer sur les sonorités surprenantes des claviers, donnant ainsi de prime abord l’impression d’un disque à la froideur clinique, dominé par une certaine austérité électronique. Mais comme toujours chez les Nits, les mélodies et les détails subtils d’une production pointilliste prennent le temps de se révéler pour finir par imprimer durablement notre mémoire. De l’éclatant single « Love Locks » à la beauté sombre et raffinée de « Big Black Boats », « Malpensa » divulgue ainsi peu à peu ses saveurs délicates, jusqu’à en devenir tout simplement indispensable.

Truffées comme d’habitude de références géographiques (Cologne, Florence, la place Tahrir…) et artistiques (John, Bob, Leonard et Neil, héros éternels et influences convoquées dès « Five Fingers »), les chansons des Nits conservent cette légère touche d’exotisme, ce décalage sur le fond comme sur la forme qui ont toujours fait la personnalité de ce groupe décidément pas comme les autres. La troupe sait également s’entourer lorsqu’elle cherche à renouveler ou enrichir sa formule magique. Un DJ, un contrebassiste et un trompettiste sont ainsi invités à se pencher sur le sort du joliment titré « Bad Government and Its Effects on Town and Country ». Le résultat, au delà d’un texte poignant qui trouve dans notre actualité une résonance particulière (« bankers and robbers are partners in crime, politicians lying all the time… »), démontre tout au long de huit minutes en apesanteur, que Henk Hofstede et ses hommes ont encore probablement quelques belles cartouches en réserve.

Atterrissage en douceur suite à cette envolée spectaculaire, « Paper » referme ce disque, d’ores et déjà voué à trôner parmi les classiques du groupe, sur une évocation astucieuse du courant impressionniste. Portée par une mélodie tournoyante et habitée par un incroyable sentiment de liberté, celle-ci résume assez bien les Nits, cette curiosité hollandaise qui a toujours contribué, par une intelligence et une originalité hors du commun, à rendre le quotidien de la musique pop moins monotone.

 

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