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The Sea and Cake – Runner

The Sea and Cake - RunnerHistoire de célébrer comme il se doit ses dix-huit années de service, The Sea and Cake signe cette prouesse : un disque qui parvient à faire cohabiter l’éclat et la fougue de la jeunesse avec une habileté et une finesse auxquelles seules la pratique et l’expérience peuvent permettre d’accéder. « Runner », à l’image de ses prédécesseurs, amalgame les différentes facettes du quatuor chicagoan, respectable entreprise en activité depuis 1994. Jazz, post-rock, bossa nova ou encore soft-pop influent ici sur des chansons à l’armature classiquement indie-rock. Impeccable sur un plan mélodique (« Harps », sur laquelle le chant aérien de Sam Prekop fait des miracles) et ouverte à tous les courants, à toutes les audaces (la six-cordes voyageuse d’Archer Prewitt sur l’irrésistible « A Mere »), la musique de The Sea and Cake exhale tout au long de cet album un parfum d’insouciance grisant et forcément bienvenu en ces temps de pessimisme généralisé.

C’est avec une endurance de marathoniens que nos hommes parcourent ce « Runner », d’une excursion dans les contrées ambient chères à Brian Eno (les nappes synthétiques ouvrant « The Invitations ») aux pulsations métronomiques d’une cavalcade lézardée par une guitare chipée à Tom Verlaine (« New Patterns », composition la plus fidèle aux standards du groupe) en passant par une balade pop-folk bucolique (« Harbor Bridges »). Si ce dixième long format possède un caractère un peu plus évident que les travaux antérieurs de Sea and Cake, c’est aussi parce qu’il abrite quelques titres au potentiel tubesque manifeste. On pense ainsi à « On and on », dont le riff implacable lance l’album sur un choc électrique renvoyant à Dinosaur Jr., mais aussi aux vigoureux « Skyscraper » ou « Pacific », morceaux de choix à l’énergie simple et contagieuse.

Disque protéiforme et accompli, « Runner » se révèle tellement addictif que toute tentative de résistance serait vaine. Si la troupe n’a pas modifié son approche, si l’on retrouve ici tous les composants d’un savoir-faire qu’elle a su approfondir méthodiquement au fil des ans, ce disque trouve l’équilibre parfait et pourrait bien s’avérer être son meilleur. Pourquoi alors s’évertuer à scruter ici ou là le nouveau groupe à la mode, la prochaine sensation appelée à agiter le landerneau indé ? La fraîcheur et l’excitation authentiques sont plus sûrement à chercher aujourd’hui du côté de nos fringants quadragénaires de Chicago. Au sommet de son art, The Sea and Cake a donc dix-huit ans. Plus que jamais un groupe majeur.

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