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Disques

The Apartments – Fête foraine

 The Apartments - Fête foraine

Comme s’il avait voulu rattraper une décennie perdue lors de laquelle il n’aura sorti qu’un seul album et une poignée de singles (tous essentiels, certes), les années 90 ont vu Peter Milton Walsh accélérer nettement le rythme. Se suivirent donc d’assez près “Drift” en 1993, “A Life Full of Farewells” en 1995 et “Apart” en 1997, avant un long silence finalement rompu ces dernières années, sur scène puis sur disque. Dans les interstices se glissèrent la réédition bienvenue de “The Evening Visits… and Stays for Years” en 1994, et le méconnu “Fête foraine” en 1996, qui nous occupe ici. A l’époque, il fallait commander ce CD au titre francophile en Australie, ce qui destinait l’objet aux fans les plus motivés – qui tiennent le disque en très haute estime. Une réédition en CD et vinyle chez Microcultures, au son toiletté et redesignée par le graphiste Pascal Blua, le rend enfin accessible à un plus large public.

Sur “Fête foraine”, Peter Walsh s’essaie pour la première fois à un exercice auquel il s’est beaucoup prêté dernièrement : se retourner sur son passé, revisiter ses chansons, les mettre à nu en débranchant la prise pour en révéler la plus secrète beauté. Certaines étaient encore jeunes à l’époque (une bonne partie des morceaux de “A Life Full of Farewells” sont présents ici), mais on ne les avaient jamais entendues ainsi. Guitare acoustique, tambourin, bugle, trompette, un peu d’orgue peut-être, et surtout le piano très présent de Chris Abrahams, aux échos parfois satiesques (l’intro gymnopédique de “End of Some Fear”) redessinent à l’aquarelle les mélodies, à la limite de l’évanescence, de la transparence. Chaque note, chaque silence, chaque mot presque murmuré par cette voix de matin blême touche à l’essentiel, prend une densité incroyable. Dans ces versions sur le fil, d’une fragilité bouleversante, le plus léger crescendo a la puissance d’un fortissimo.

C’était l’époque où, aux Etats-Unis, Low, Spain, les Red House Painters et quelques autres affirmaient contre le vent du bruit les vertus de la lenteur, de la parcimonie et des ambiances de confessionnal. Dans son splendide isolement des antipodes, Peter Walsh pourrait apparaître ici, rétrospectivement, comme leur cousin, leur grand frère, leur parrain. Tous vaguement unis par le même sens de la fête, foraine ou pas, qui n’est sans doute pas celui de tout un chacun – “Not every clown can be in the circus”. Nous sommes en tout cas quelques-uns à le partager.

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