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Track by Track – “Local technique” par Le Bâtiment (inédits 2013-2022)

Best of plutôt que fonds de tiroirs, l’exploration de ce Local technique (inédits 2013-2022) est un enchantement de bricolages et d’artisanat passionné. Le Bâtiment a bien voulu revenir par écrit sur l’enregistrement de ses chansons. Track by track à lire plus bas.

Le Bâtiment est un océan. Avec ce « Local technique », on imaginait fouiller dans les entrailles des rebuts de la création d’un artiste hautement prolifique, ramasser les bouts de chansons épars, les créations bancales d’un artiste pourtant très spontané. On est en fait, presque, dans son meilleur. Dix ans de création et pourtant on tient le même fil, semble-t-il, celui du môme éternel, d’un Murat déconfit, car le Bâtiment ne fera pas le joli cœur avec Mylène Farmer chez Drucker comme en pleines années fric (c’était chic). On est plus prosaïque et dans le réel boueux jusqu’au cou en 2010 :

Payer le loyer tous les mois

Aller pleurer au pôle emploi

Je suis de moins en moins humain

Re-faites de moi

un gamin

(“Un gamin“)

Question arrangements aussi, on n’est pas chez le berger de Chamalières mais chez l’antifolk à son meilleur soit la spontanéité, l’efficacité et l’écriture maligne de Prewar Yardsale sur “Je vais te vivre” ou tout simplement chez un Silver Jews français (“Un nœud au ventre” ou encore “J’irai devant”, rappelant aussi un autre poète en plein air, Kyles Fields de Little Wings). N’en jetez plus, on est conquis. On est chez nous, oserait-on dire malgré tout…

On est bien en peine de chercher un titre un peu fade… Et on se demande même comment ces titres ont pu rester inédits ? Le léger “Fredonne” ou le doux-amer “Nous n’avons jamais été amoureux”.

Que s’est-il passé ? Qui a pu empêcher le Batiment, en liberté, d’émailler ses précédentes et nombreuses sorties de ces pépites ? “Ces nombreux comas”, magnifique science du titre, ou encore “Trois couplets pour Nord Plage” qui rappelle l’ensoleillé Katerine sans la samba et enfin l’énorme “De Thiais aux Gobelins” et sa surprise percussive (Chut ! plus un mot, on vous laisse découvrir ce titre final et son instrumentation. Qui l’eut attendue ?).

Et toujours l’alliance du bon mot choisi, du passé simple d’une langue belle et recherchée et du blues crade. La dignité en somme.

Rappelons que les albums du Batiment sont téléchargeables gratuitement sur Bandcamp. Et  absolument indispensables.

La parole est au Bâtiment :

“Gamin”
J’ai écrit et enregistré une quinzaine de morceaux en 2017, une bonne partie se retrouve sur cette collection, là, c’est le versant disons, grave et solennel, du Bâtiment.

“Je vais te vivre”
Pas mal expérimenté autour des accordages malkmusiens pour me retrouver avec des mélodies familières mais construites autour d’harmonies quelque peu mystérieuses.

“Un nœud au ventre”
Le plus vieil enregistrement de cette compil’, rétrospectivement, ne pas l’inclure à “Jerusalem” tenait sans doute à son côté « enlevé ».

Contrebande
Autre exemple de mon sérieux en 2017.

Celle que tu ne seras pas
Une chanson arrive parfois, qui mettrait en danger la fragile cohésion d’un disque, mais il me faut à tout prix l’enregistrer !

J’irai devant
À nouveau ce besoin de passer par les dissonances pour retrouver l’harmonie.

Nous n’avons jamais été amoureux
Musicalement, c’est plus classique, mais situer les faits dans la petite enfance rend tout cela plus original, voire, dérangeant j’imagine.

Thème de « Contre-Intuitions« ”
Un petit truc qui n’avait pas trouvé sa place à l’époque mais qui, j’espère, fait le charme de ce genre de collections.

Le Plaisir et la Peine
Certains morceaux s’écrivent par hygiène, la nécessité en est presque physique, s’attacher à « La méthode » comme j’ai titré un de mes disques, permet de calmer mes bouillonnements intérieurs.

Ces nombreux comas
Je suis donc allé un peu dans tous les sens en 2017, là j’ai tenté le truc plus immédiat, plus plaisant, le petit tube.

Fredonne
Le passage parlé, c’est l’instant kitsch par excellence, certains détestent, j’ai osé. Avec un léger emprunt à « Bohemian Rapsody » dans la mélodie pour faire bonne mesure.

Trois couplets pour Nord-Plage
Un quartier en Martinique, sur la côte Nord Atlantique. Un pan de l’Histoire locale, que j’ai vu tragiquement évoluer à quelques années de distance. Il existe même un film avec Pascal Légitimus et Marianne Faithfull qui s’y déroule, la portée symbolique du lieu ne m’appartenant pas, j’ai fait la seule chose qui m’est autorisée, écrire de mon point de vue.


Mains de bandit
Parfois, il suffirait d’un morceau pour qu’un disque « plombé » devienne « plombant »! « Tue-tête » n’en avait pas besoin.

Ma trace
Un morceau très ancien que je n’avais jamais oublié, je l’ai donc réenregistré pour qu’il ne se perde pas…il a tout de même fini au fond d’un tiroir.

L’Herbe défendue / Little Darling Pal of Mine
Comme les Beatles, j’ai enregistré mon medley.

Nulle part où aller
On est là face à l’intuition d’une séparation, malgré nous des choses nous traversent, en amont, et nous pètent à la figure, en aval.

De Thiais aux Gobelins
Trois amis ont inspiré ça, dont l’un avec qui j’écrivais des chansons au lycée et pour qui « Ne l’oublions pas », une autre chanson, a été enregistrée.

Propos recueillis par courrier électronique début 2023.

Avec l’aide de Johanna D., enfermée dans le Bâtiment.

“Local technique (inédits 2013-2002)” est sorti numériquement sur Bandcamp le 27 janvier 2023.

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