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Disques

Ão – Ao mar

Vous n’avez jamais imaginé Portishead en train de s’étirer lascivement sur une plage de l’Algarve ? Vous pouvez rattraper le coup en écoutant le premier lp des Belges d’Ão, qui proposent un chaud-froid musical aussi passionnant que revigorant.

Paradoxe. Alors que leur musique est une invitation au voyage des plus engageante, les Flamands d’Ão ne sont pas encore beaucoup sortis des limites de la Flandre belge. En tout cas pour tourner. Car leur premier album, publié ce 6 octobre chez Mayway Records, a lui été conçu à égalité entre la Portugal et la Belgique.

La chanteuse du groupe, Brenda Corijn, possède en effet des racines mozambicaines et portugaises, et s’exprime sur Ao Mar  (“Vers la mer”) principalement dans la langue de Pessoa (et aussi, un peu moins, dans celle de Shakespeare). Elle et ses trois acolytes Siebe Chau (guitare), Jolan Decaesteker (claviers) et Bert Peyffers (percussions) osent une proposition musicale inédite, même si l’on pense tout de même forcément à ce que produisaient les Lusitaniens de Madredeus dans les années 90.

On entre tout de suite dans le vif du sujet avec l’incipit Meninas : jeux de percussions originaux, arrangements épurés et riches à la fois, voix expressive et chant en portugais créent une ambiance assez unique, d’où se dégage une sorte de mélancolie solaire qu’on retrouvera tout au long de l’album. Ponctué d’interludes ambient, Ao Mar nous invite bien à une déambulation grâcieuse et libre, et l’on se prend par instants à imaginer un Portishead qui aurait quitté les brumes de Bristol pour s’installer sous le soleil lisboète, ou même les latitudes subtropicales du Mozambique.

L’album, produit par Decaestecker et mixé par Jasper Maekelberg (Balthazar, Gabriel Rios…), fait briller de nombreuses pépites comme Mulher, dont l’ampleur sonique et les digressions passionnent ; Avó , tout en langueur, dont le chant superbe s’enlace aux mélodies, pour une saudade rafraîchie par une production made in Belgium ; Speak et son univers à la Beth Gibbons-Rustin Man ; Guardar et ses étonnantes incursions psychédéliques ; la perle Vazio, qui dans sa rythmique rappelle Arab Strap, et progresse avec délicatesse, toute en mélodies somptueuses ; Crowd et son electro-folk captivant ; et pour finir More, trip-folk en apesanteur qui amène à faire une réclamation : oui, on en veut encore, et on aimerait vraiment beaucoup voir le groupe sortir des frontières de la Belgique néerlandophone pour se produire près de chez nous… Afin de profiter définitivement cet hiver des bienfaits du soleil noir d’Ão.

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