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Disques

Joanna Newsom – Divers

Joanna Newsom - Divers

Avec Joanna, on est toujours sur le fil (pas sur la corde à linge de Camille), toujours à deux doigts de la prendre en grippe. Si nous avions boudé son irritant premier album, nous avions en revanche beaucoup aimé l’équilibriste « Ys » entre prise de son brut Albinesque (voix et harpe) et enluminures barrées et baroques de Van Dyke Parks. Avec « Have One On Me«  (dont on approuve chaque ligne de la chronique du collègue), Newsom avait la configuration idéale pour nous : composition et arrangements fins et minimaux, quasi chirurgicaux, pour accueillir ce qu’on préfère, à savoir Joanna, sa voix, sa harpe (et un petit peu son piano). Avec « Divers », Joanna Newsom a, une fois de plus, risqué le plongeon dans le trop-plein et le disque a failli finir dans les faits divers, avec pertes et fracas.

Sa voix mutante et toujours en mutation se risque encore dans de vertigineuses pentes entre June Carter et Kate Bush et on frôle souvent l’agacement dans des compositions labyrinthiques faites pour se perdre. « Divers » est bien souvent broussailleux et il faut bien tendre l’oreille pour aller pêcher la harpe à droite à gauche. Certes, il y a bien quelques belles échappées (« A Pin-Light bent ») mais on est le plus souvent submergé par le toujours plus de monsieur Bahlsen. Plus de cuivres, plus de bois (on était habitué à la surenchère), mais aussi encore plus de changements de directions à vue, aussi bien mélodiques que de couleurs, dans chaque chanson. Notons toutefois l’apparition de boîtes à rythmes et de claviers un peu cheap et quelques fois criards (« Leaving the city »), en contrepoint des clavecins et pianos à queue d’hier. On hurlerait presque au viol. Ajoutons aux déjà lourdes charges, le côté bastringue-folk tradi qu’on n’a toujours que toléré et qui est ici souvent très présent (« Same Old Man » malgré un très beau contrepoint de claviers vrombissants).

Alors, on s’est replongé dans « Have One On Me » pour éprouver le nouveau « Divers ». Evidemment, on est toujours touchés par des splendeurs comme « Esme » mais à la comparaison, les précédents albums souffrent d’un certain systématisme de composition et force est de constater que « Divers » creuse d’autres voies, plus sinueuses, moins évidentes, moins transparentes. Il y a des albums immédiats, d’autres qui se révèlent au bout de trois écoutes, « Divers », lui, a besoin d’une maturation beaucoup plus lente que d’habitude pour révéler ses parfums un peu plus lourds et capiteux.

On sera prêt, alors, à la suivre à peu près n’importe où, même dans les rues des grandes villes modernes (« Sapokanikan ») et ce, malgré sa robe de bohémienne, ou dans les nuages colorés et acides de Paul Thomas Anderson (« Divers »), où on s’attend à tout moment à voir apparaître le dragon de l’histoire sans fin.

Ouf, on ne nous a pas complètement changé notre petite sorcière folk. Elle vit toujours dans la forêt magique (le soyeux, sauvage et final « Time, As A Symptom ») sur son lit de mousse avec les hululements de hiboux (qui ne sont définitivement pas ce que l’on croit) et les pépiements d’oiseaux au-dessus de sa tête. « Divers », album à (ré)évaluer d’ici quelques mois.

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