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Buck 65 – Interview

 

BUCK65

De passage à Paris avant le festival des Inrocks Rich Terfry aussi connu sous le nom de Buck 65 se livre à une petite séance de photo dans les salon d’un hôtel rococo. Son extrême gentillesse et sa simplicité tranchent avec l’aspect guindé et maniéré de l’endroit. Un peu plus tard, confortablement installé dans un fauteuil club il répond à nos questions. Juste avant le démarrage de sa tournée (toutes les dates sont dans POPscene) Il est temps de revenir sur cet entretien où Buck 65 nous parle de ses influences, de son amour pour le public français et nous donne des conseils de lecture.

buck65

Bonjour, alors, de retour à Paris ?
Oui, c’est génial, comme toujours. Je commence à voir Paris comme ma maison. J’y ai passé toute l’année dernière et je reviens régulièrement… et… hum, je me sens vraiment bien ici. C’est l’endroit où je reviens le plus souvent. Comme je suis sans domicile fixe pour le moment, je crois que Paris est devenu mon chez moi. J’adore cet endroit. Et ça se passe super bien avec le public français… Ça fait quelques temps que je pense à m’installer quelque part de façon plus permanente et à mon avis ce sera ici à Paris, ou du moins en France, parce que ça se passe super bien et que je suis tombé amoureux de l’endroit.

Mais pour le moment tu es de retour au Canada…
Oui, et c’est assez différent, ça va plutôt bien pour moi aussi au Canada, mais ce n’est pas pareil, il y a une grosse différence culturelle. Il me semble que l’intérêt du public se porte sur différents aspects de ma musique… Je ne sais pas, parfois je me dit qu’ici on m’apprécie pour les bonnes raisons, j’ai l’impression que le public me comprend mieux. Alors que parfois, surtout en Amérique du nord, c’est très différent, c’est purement basé sur la façon dont la campagne marketing s’est faite, ce que untel a dit et que les gens vont prendre pour parole d’évangile sans trop y réfléchir. Ce que j’ai remarqué, c’est que les français pensent par eux même, se font leurs propres opinions. Et ça se voit, n’importe quel quidam ici est tellement plus ouvert à la politique, intéressé par des sujets divers et variés. Simplement le fait que l’on voit des manif quasiment tous les jours à Paris est la preuve de cet esprit, de cette implication. D’accord, c’est presque devenu un hobby… Mais cela n’enlève rien au fait que les gens sont plus impliqués, plus ouverts, plus capables de se faire leur propre opinion et de la défendre. Même la presse, quand je suis en promo par ici, me pose des questions qu’on ne me pose pas ailleurs. Les gens réfléchissent et analysent plus. Et même s’il y a la barrière de la langue, j’ai l’impression qu’on me comprend mieux, que l’on fait plus attention et que dans une certaine mesure les gens se sentent concernés par ce que je fais. C’est très, très agréable.

Et quels sont les aspects de ton travail qui constituent ces bonnes raisons de t’apprécier ?
Hum… Je dirais mon écriture, mes mots et c’est peut-être bizarre justement à cause de la barrière de la langue, mais je crois que le public a envie de prendre son temps, de bien rentrer dans mes textes. Et c’est d’ailleurs pour ça que j’ai décidé d’inclure les textes dans la pochette de l’album. Je voulais que le public français ait accès à tout ça. J’ai vraiment fait un effort pour que cet album soit beau. Je voulais faire de la bonne musique mais aussi un bel objet, un tout qui se tienne, qui soit agréable. Parce que j’ai l’impression que le public apprécie le coté esthétique de la chose ici, alors que c’est complètement inutile ailleurs. C’est comme si, ailleurs, les gens ne faisaient pas vraiment attention. C’est l’attention aux détails qui vous caractérise je suppose. Et comme je prends mon temps et que j’accorde beaucoup d’attention aux détails, que j’essaye de faire un travail très soigné ça me plaît que les Français partagent cette obsession.

Avec cette attention aux détails qui te caractérise, te considères-tu toujours comme un chanteur, un artiste hip hop ou alors comme un raconteur d’histoire ?
Pour moi je suis les trois. Avant tout, je suis un raconteur d’histoire, et je crois que ce que je fais fait partie d’une longue tradition musicale. C’est comme de la folk musique où la musique est un media pour raconter une histoire. Un des trucs que je fais sur scène dans les pays anglophones, c’est que je raconte des histoires (NDLR : les spectateurs du show de la Guinguette Pirate s’en souviennent). Je le fais aussi en France, mais dans une moindre mesure, j’essaye de parler en français, d’échanger. J’aime bien, en général je raconte des histoires assez barrées qui parlent de mon enfance.
Donc, parfois je me demande si ce n’est pas trop dur pour le public… Alors, voilà, mais pour cet album j’ai aussi voulu m’attribuer le titre de songwriter. En écrivant réellement toutes des chansons moi même plutôt que de recourir aux samples. J’ai essayé de rendre cet album aussi musical que possible. Je me suis attaché aux structures, et à la théorie, j’ai voulu faire de vraies chansons.

D’ou la différence entre cet album et les précédents (pas de titres pour les chansons de « Man Overboard », juste quatre longues plages pour « Square »)…
Yeah, exactement, mon objectif principal était de rendre l’album plus crédible du point de vue musical. Mon envie avec la musique, c’est qu’un jour je fasse un album que l’on puisse comparer sans rougir à d’autres albums quels que soient leurs genres. Quand on lit les listes des 50 meilleurs disques que la presse publie régulièrement, on retrouve toujours quelques disques, toujours les mêmes, quel que soit leur style. Il y a certains albums de Bob Marley que le public considère comme des classiques – pas un classique du reggae, juste un classique. Même chose pour Miles Davis, ou les Beatles. Et si un jour, je veux faire partie de ces listes, il faut que je perfectionne ma technique musicale, que je rentre dans le détail de la composition. Pour le moment, je sens que j’ai franchi une étape, que j’ai mûri. Je deviens un musicien un peu plus… sérieux. J’essaye de ne pas faire du bon hip hop, mais simplement de la bonne musique, que les gens apprécient.

Et tu n’as pas peur en faisant ça de perdre certain de tes fans qui eux, veulent un Buck 65 hip hop ?
Oui, je sais que c’est le cas, mais je pense que chaque fois que je perds un fan qui ne veut pas me suivre dans mes pérégrinations, j’en gagne une vingtaine qui sont prêts à prendre part à l’aventure. Surtout depuis un an ou deux. Et puis, je revendique l’influence de Johnny Cash, Tom Waits et PJ Harvey, et, je me demande, puisque ma musique est influencée (depuis toujours) par ces artistes si je ne peux pas toucher les fans de ces personnes. C’est aussi pour ça que je suis passé sur une major. Les indés sont souvent restreints autour d’un seul genre et moi je voudrais être transversal. Parce qu’avec une étiquette hip hop, c’est très dur de passer outre un certain a priori du public. Et cet a priori n’a rien à voir avec ce qu’est réellement ma musique. Je sais que le disque doit rentrer dans une case, ne serait-ce que pour savoir où le mettre dans la boutique, mais c’est pesant de n’être considéré que pour un seul aspect de sa personne. C’est très réducteur. Je ne veux pas limiter mon public. Je ne fais pas du hip hop, je ne fais pas du folk, je ne fais pas du rock, je fais du Buck 65.

Et si tu n’es plus dans le hip hop, ça veut dire qu’il n’y aura plus jamais d’album des Sebutones ?
Non, au contraire, d’ailleurs demain, je m’envole pour le Canada, je m’installe pour quelques temps dans un appart qui est en face de chez Sixtoo et on va bosser ensemble sur un nouvel album. Ca va être quelque chose de complètement nouveau, l’album de punk-rock-hip-hop le plus barré de l’histoire. Ca va être génial. c’est ce que j’ai envie de faire pour le moment. J’y pense en ce moment.

Tu es quelqu’un de prolifique normalement ? Je me souviens qu’à la Guinguette (avant même la sortie de « Square ») tu nous avais fait une version de « Wicked and Weird » a cappella, et il a fallu pas mal de temps pour qu’elle voit le jour sur disque…
Oui, en fait, je devais m’adapter à mes nouveaux outils. Ce serait vraiment bien si on pouvait enregistrer un titre et que ce titre soit dispo le lendemain, mais c’est pas possible, il faut du temps… Beaucoup de temps. Mon problème c’est que j’ai toujours trop de matériel, je ne sais pas quoi faire avec toutes ces chansons. Et quand arrive le moment de la sortie, il faut faire un paquet de choix. Qu’est-ce qui va finir sur le disque, qu’est-ce qui va devoir attendre encore un peu. Je me souviens, qu’en 97, quand j’ai sorti « Vertex » il y avait une chanson dessus que j’avais écrite en 92. Donc, il faut parfois du temps pour que les choses évoluent. Parfois je pense qu’on pourrait enregistrer, mixer et diffuser la musique directement sur internet, sans penser à la vendre, simplement en donnant des concerts histoire de gagner suffisamment d’argent pour vivre. Ca ce serait bien. Je suis très impatient. J’ai tout le temps envie de partager ma musique. Comme tu le disait, à la Guinguette, cette chanson était toute neuve, mais déjà elle me brûlait les doigts, il fallait que je la partage et c’était au moins un an avant que je n’enregistre la moindre note pour l’album. Je crois que c’est une bonne méthode, en tous cas pour moi, d’expérimenter sur scène avant d’enregistrer. De cette façon, on peut voir les réactions du public, on peut faire vivre la chanson, et l’interprétation s’en ressent. C’est toujours meilleur au moment de l’enregistrement.
J’aime bien faire participer le public, on obtient des résultats parfois très surprenants. Par exemple, j’ai demandé au public de sélectionner le prochain single extrait de l’album sur mon site. Et je ne m’attendais pas du tout au résultat. C’est intéressant et j’aime bien faire participer le public. J’ai un grand respect pour l’opinion du public. Je fais ce que je fais POUR le public, donc c’est bien d’avoir son avis de temps en temps. 

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