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Dominique A – Interview

Cela s’est passé au tout début de la semaine du marathon promotionnel que Dominique A a connu à Paris à l’occasion de la sortie de « L’Horizon », son septième album. Au cours de cette semaine, on aura entendu quatre (!) fois le chanteur sur les différentes ondes de Radio France, lu des critiques plutôt enthousiastes de l’album dans la plupart des revues spécialisées et jusque dans la presse nationale (avec un tiercé gagnant inattendu, puisque, outre le Monde et Libération, même Le Figaro y est allé de son engouement saisonnier). Bref, il semble qu’aucun de ses disques n’ait connu une telle couverture médiatique et un tel accueil. Mais dans un premier temps, si on a le sentiment d’en avoir bouffé, on risque aussi de digérer vite et mal la nouvelle livraison musicale de Monsieur Ané. Il a fallu attendre quelques semaines et un peu de recul pour apprécier mieux la largeur et la profondeur dudit « Horizon », disque qui, sans rien renier du passé, laisse l’inspiration gonfler les voiles, dans un étrange voyage où l’avant et l’après, l’hier et le demain s’interpénètrent insidieusement. Disque de plénitude et de maturité sans doute. Disque ouvert à tous les vents aussi.
C’était donc un lundi matin, Dominique A sortait du Thalys venant de Bruxelles et s’attablait quelques instants dans un café pour délivrer ses premières impressions de route à POPnews.

Comment juges-tu a posteriori « Tout sera comme avant » alors que tu viens présenter ton nouveau disque ?
Dominique A : de toute façon , l’avant-dernier, c’est toujours le vilain petit canard, celui qu’on dénigre un peu. Donc, je prends garde de ne pas trop le dénigrer. Il y a des choses que je ne renie pas du tout dans les arrangements et la production. En revanche, j’ai un problème de taille avec le chant. Je trouve qu’il y a la moitié des chansons qui ne sont vocalement pas assumées et qui n’emportent pas « le morceau » avec elles. C’est lié au fait que, lorsque je faisais les prises de voix, je le faisais à froid, je n’avais pas fait les parties de guitare avant, je ne m’étais pas confronté au micro, et ça a un peu sacralisé le moment où la voix se pose, ce que je déteste a priori. Pour moi, la prise de voix doit se faire naturellement, ça ne doit pas être le moment où tu allumes les bougies, fermes les fenêtres et où, finalement, tu scléroses tout. J’avais envie de faire un disque assez vite après, car « Tout sera comme avant » a eu un accueil mi-figue mi-raisin, et c’était un peu triste de rester là-dessus.

Est-ce que ce n’est pas aussi tout simplement un peu de temps qui a manqué sur « Tout sera comme avant » pour faire la symbiose entre les arrangements et tes textes ?
J’ai voulu rompre avec tout ce qui était culture et rock indé, ce pourquoi il a pu être moins compris par les gens qui écoutent cette musique. Ceux-là ont dû trouver qu’il y avait par moments des trucs qui relevaient plus de la world music, parce que ceux qui ont fait les arrangements (le collectif Gekko, ndlr) sont férus de ça. Mais a contrario, il y a des gens qui ont été nourris à autre chose et qui l’ont aimé. Il est sans doute un peu à part dans ce que j’ai fait en termes musicaux. Mais c’était aussi l’objectif. Il y a des chansons comme « Les Éoliennes » ou « Dobranoc » que j’aime encore beaucoup telles quelles et qui n’auraient pas pu être conçues de cette façon-là dans le cadre musical du rock indé. Je cherchais à m’éloigner de cela, j’en avais marre de l’indulgence et de l’élitisme qu’il y avait dans certains concerts de groupes anglais ou américains ; j’ai eu très fortement ce sentiment de sclérose à l’occasion de certaines soirées, ce qui m’a conduit un peu à cracher là-dessus et à vouloir aller au large. Même si c’était un peu cracher sur soi-même. Mais voilà, aujourd’hui, je suis revenu à la maison.

Sur le nouveau disque, il y à la fois une rupture avec ce qui précède et un petit côté « résumé des chapitres précédents », non ?
Pour moi, c’est pas un disque de rupture, mais plutôt un disque synthétique, au sens premier du terme. J’entends un peu de tous les disques que j’ai faits avant sur celui-là. C’est un peu un inventaire avant fermeture, j’ai l’impression. C’est pas le disque définitif, loin de là, mais il fait l’état des lieux de ce qui m’a occupé pendant quatorze ans. J’avais aussi envie de retravailler avec Dominique Brusson et de faire un bilan de nos évolutions respectives, parce qu’on avait pas travaillé ensemble sur un disque depuis « Remué », même si on avait tourné depuis. J’avais très envie de travailler en circuit fermé, pour le coup. J’avais ouvert les vannes sur « Auguri » pour la production (à John Parish, ndlr), et après ça avait été ouvert encore plus tous azimuts sur le suivant, mais là j’avais envie de quelque chose de presque frileux. Mais d’assumé. Ça fait du bien aussi d’être parfois dans une position plus confortable. Sinon, c’est que du risque à tout va, et c’est stérile. J’avais vraiment envie de remettre les pieds sur terre, avec mes repères, mes systématismes, mes façons de jouer de la guitare un peu limitées parfois, et de faire en sorte que les gens autour de moi me permettent d’enrichir aussi le propos.

Est-ce que le fait d’avoir ces repères est un des facteurs qui donnent au disque son côté presque léger ?
Disons que c’est le son qui est très aéré. Y a très peu de saturations. C’est mon optique d’avoir un disque très clair. Après, il y a les harmonies créées par les instruments eux-mêmes : avec les vents, il y a tout de suite une ouverture harmonique énorme. Le piano a aussi une part importante, c’est vraiment une question de tessiture de son, de placement dans l’espace sonore. Et puis, ce n’est pas un disque de batterie. L’espace est donc très dégagé rythmiquement. Parfois, y a pas de rythmique, ou elle intervient tardivement comme sur « Antaimoro », où la batterie intervient sur ce qui sert de refrain. Les moments où tout le monde joue ensemble sont assez rares, ce qui crée ce sentiment de flottement ou d’aération, ou pourquoi pas de légèreté.

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