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Destroyer – Trouble in Dreams

DESTROYER – Trouble In Dreams
(Rough Trade / Beggars) [site] – acheter ce disque

DESTROYER - Trouble In DreamsIl y a quelque chose d’un peu décourageant à chroniquer pour la cinquième fois un disque de Destroyer. Non que les productions de Daniel Bejar soient mauvaises, bien au contraire – et ce "Trouble in Dreams" est au moins aussi bon que les albums qui l’ont précédé depuis "Streethawk: a Seduction" en 2001. Simplement, on constate que malgré des sorties régulières (à peu près une par an en moyenne) et d’une qualité constante, le groupe canadien jouit toujours d’une notoriété proche du néant en France, et sans doute dans pas mal d’autres pays. Il est vrai que, comme avec les Pernice Brothers par exemple, la quasi-absence de concerts sur nos terres, la promotion minimale et les changements fréquents de label et/ou de distributeur n’aident pas vraiment… Alors que de nombreux compatriotes se sont laissé porter par la grande vague du rock indé à feuille d’érable, Destroyer en est toujours à racler le fond, et c’est bien dommage.

Pour évoquer ce huitième album, on pourrait se contenter de renvoyer aux chroniques précédentes. C’est sûr, ceux qui connaissent déjà l’univers étrange et complexe de Bejar (qui collabore par ailleurs aux New Pornographers et à Swan Lake) ne devraient pas être trop dépaysés. Son obsession glam/Bowie ne semble pas encore guérie, sa voix est toujours aussi délicieusement maniérée, hésitant entre le parlé et le chanté, traînant sur les diphtongues, et ses textes sont à peine moins amphigouriques qu’à l’habitude ("They stuck eternity inside a bird’s fist just to watch it fly", bon…). Le groupe qui l’accompagne est quasiment le même que sur l’album précédent, "Destroyer’s Rubies", les producteurs JC/DC (John Collins et David Carswell) sont toujours aux manettes, et le son est donc assez proche, riche en détails et en contrastes, mêlant de façon magistrale acoustique, électrique et synthétique.

Dès le morceau d’ouverture, "Blue Flower/Blue Flame", dans lequel Bejar semble entrer par effraction (pas d’intro, il chante dès la première seconde, comme souvent), les guitares – jouées par lui-même et Nicolas Bragg – ravissent. On croirait presque entendre Maurice Deebank de Felt derrière ces cascades de notes d’un extrême raffinement. Ailleurs, c’est à Mick Ronson ou Tom Verlaine (dans ses moments les plus jazzy) que l’on pense, une certaine aristocratie rock seventies. Le single "Foam Hands" rappelle, lui, les plus beaux morceaux des Only Ones, comme "The Whole of the Law", ces fauves assoupis mais prêts à sortir les griffes. Quant à "Plaza Trinidad", c’est les montagnes russes de Pavement, mais avec des virtuoses dans le wagonnet.

"Trouble in Dreams" montre un groupe – puisque Destroyer semble en être vraiment un désormais – en pleine possession de ses moyens et au sommet de son art. Plus sereine, moins tirée par les cheveux coupés en quatre, l’écriture de Bejar semble être arrivée à pleine maturité. Si seulement plus de gens pouvaient en profiter.

Vincent Arquillière

A lire également, sur Destroyer :
la chronique de « Destroyer’s Rubies » (2007)
la chronique de « Your Blues » (2004)
la chronique de « This Night » (2003)
la chronique de « Streethawk : A seduction » (2002)
Blue Flower/Blue Flame
Dark Leaves Form a Thread
The State
Foam Hands
My Favorite Year
Shooting Rockets (from the Desk of Night’s Ape)
Introducing Angels
Rivers
Leopard of Honor
Plaza Trinidad
Libby’s First Sunrise

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