WIRE – Object 47
(PinkFlag / Differ-Ant) [site] – acheter ce disque
Trente ans après, que sont devenus les groupes apparus dans l’après-punk ? La plupart ont disparu de la circulation, chose logique vu le temps écoulé et leur peu d’empressement à faire carrière. Les plus endurants se sont transformés en dinosaures (U2, Cure, Depeche Mode, voire Siouxsie sans ses Banshees), encore capables de pondre un bel œuf de temps à autre. Certains se sont reformés récemment, pour des apparitions scéniques plus ou moins lucratives et ponctuelles (Gang of Four, Young Marble Giants, Slits, Devo, Métal Urbain…). Quelques-uns sont même allés jusqu’à enregistrer de nouveaux albums (Mission of Burma, Savage Republic, Throbbing Gristle…), sans qu’on puisse trop les soupçonner de profiter d’une hypothétique gloire passée. Cas (clinique ?) à part, The Fall continue à sortir un album par an, si possible avec une formation différente à chaque fois.
Et puis il y a Wire. Un groupe qui, après un premier round (77-79) lors duquel il fit paraître sur EMI trois albums devenus depuis des classiques, s’est reformé à plusieurs reprises, et toujours pour de bonnes raisons. Pas pour relancer les ventes de son back-catalogue et faire plaisir à son banquier, donc, mais pour aller de l’avant, se réinventer en défrichant de nouveaux territoires. D’ailleurs, sur scène, Wire a toujours préféré jouer des morceaux inédits plutôt que de livrer le best-of attendu. Et pendant les longues périodes d’inactivité du groupe, ses membres n’ont pas chômé, enchaînant disques solo et projets divers, avec une touche conceptuelle typique des musiciens sortis des art schools britanniques.
Influence reconnue de nombreuses formations actuelles, Wire a fait paraître ces dernières années, sur son propre label PinkFlag, des disques assez radicaux, au son agressif, les accompagnant de concerts assourdissants. "Object 47" les voit revenir à une forme plus pop et accessible ; la défection du guitariste Bruce Gilbert semble avoir laissé le champ libre à ce grand mélodiste méconnu qu’est Colin Newman. Le morceau d’ouverture, "One of Us", avec sa ligne de basse imparable et son refrain entêtant, retrouve l’efficacité des singles que le groupe dégoupillait pour le label Mute il y a vingt ans ("In Vivo", "Eardrum Buzz"…), le glacis synthétique en moins. Idem pour "Perspex Icon" un peu plus loin, aussi euphorisant que n’importe quel single des Rakes.
Moins immédiats mais tout aussi réussis, les sept autres morceaux de ce onzième album oscillent entre électro atmosphérique impeccablement produite et décharges électriques implacables (la clôture "All Fours", avec un "feedback storm" aimablement fourni par l’ex-Helmet Page Hamilton). Le tout est bouclé en 35 minutes, soit un modèle de concision : une qualité dont les Anglais ne se sont jamais départis, et dont ils livrent ici, une fois de plus, une brillante illustration.
Vincent Arquillière
A lire également, sur Wire :
La chronique du concert au Trabendo (Paris, le 7 mai 2003) et la chronique de "Wire On The BOX: 1979" (2005).
One of Us
Circumspect
Mekon Headman
Perspex Icon
Four Long Years
Hard Currency
Patient Flees
Are You Ready?
All Fours