THE FATALES – Great Surround
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New York a vu naître The Fatales. Le quatuor s’est fait remarquer sur une compilation du label québécois Where Are My Records, sur laquelle ils avaient glissé le titre "Stadtpark". Pourtant, quelques années avant, ils avaient sorti un EP autoproduit en 2004, "Pretty in Pixels", qui n’avait pas attiré l’attention : c’est donc la compilation du label québécois qui leur a fourni la première impulsion, et les a amenés à se rendre à Athens, l’été dernier, pour enregistrer ce premier album, "Great Surround".
Les New Yorkais montrent leurs influences dès le début de "Evergreen". La noirceur du premier Interpol y rencontre le romantisme venimeux des Tindersticks, les arrangements de cordes ouvrent l’espace tout en gardant cet aspect vaporeux, qui entoure les mélodies d’un manteau de brouillard de toute beauté. Embrayant immédiatement sur autre chose, "Islands of Fortune" est plus direct, porté par cette ligne de basse galopante, colonne vertébrale rythmique du morceau, à laquelle se greffent les guitares en second plan, toujours menaçantes mais jamais agressives, la batterie haletante et ces touches synthétiques, qui sont autant d’enluminures qui élèvent le titre. Et il est bien difficile de prendre à défaut le songwriting des New Yorkais, tant "Old Painter" et son duo batterie-piano font merveille, renforcé par ces breaks qui tombent toujours juste là où il faut, et aussi par le chant exalté de Wayne Switzer, qui se situe quelque part entre ceux de Tom Smith (Editors), Thom Yorke ou encore Paul Banks. Le groupe est même capable d’écrire un hymne parfait pour stade, comme il le prouve avec "Vanishing Act" et ses envolées vocales, son emphase et son finale en apothéose.
Le climat redevient plus sombre, pesant sur "Stadtpark", valse d’une beauté à la fois glaçante et sensuelle. Ce qui est finalement le plus épatant, et le plus renversant dans la musique de The Fatales, c’est cette faculté à manipuler en douceur l’auditeur au travers des ambiances, toujours ambivalentes, jouant sur un panel d’émotions très vaste. De ces mélanges ressortent des mélodies de toute beauté, sublimées par la production de Andy LeMaster (Bright Eyes), légère quand elle se doit de l’être, puissante pour accompagner les morceaux plus directs. Cet exercice est parfaitement accompli sur la cavalcade de "Darkened Country", dont les lignes mélodiques évoluent à toute vitesse, tantôt aériennes, tantôt se livrant à des attaques frontales, avec des guitares qui deviennent abrasives subitement. Et quand l’éthéré "Violette" commence, l’auditeur change d’univers musical (les guitares et la compacité ont laissé leur place aux nappes synthétiques et aux grands espaces) mais la classe qui émane du morceau, son aspect romantique, sa mélodie sous-jacente sont autant de traits d’union entre les titres. De trait d’union, il est encore question avec le synthétique "City en Route", battement de coeur rythmique et planant qui annonce la sublime "Torches", qui referme le disque. Caressant, magnifique, le chant de Switzer accompagne une mélodie imparable, qui semble taillée là encore pour un stade mais ne sonne jamais complaisante, ouvrant la porte, je l’espère, à un avenir radieux pour The Fatales : en tout cas, "Great Surround" est un coup de maître, composé de dix titres d’une beauté renversante.
Mickaël Choisi
Evergreen
Islands of Fortune
Old Painter
Eveningwear
Vanishing Act
Stadtpark
Darkened Country
Violette
City en route
Torches