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Disques

Raretés (dé)confinées (20) : “I Can’t Tell in His Eyes” de Wildbirds & Peacedrums

La fin du confinement et, espérons-le, le retour graduel à une vie à peu près normale ne doivent pas nous empêcher de nous replonger dans quelques disques obscurs et oubliés. Et, parfois, d’y retrouver des chansons qui ont compté, et qui nous évoquent des souvenirs. Aujourd’hui, “I Can’t Tell in His Eyes” de Wildbirds & Peacedrums (2007).

Il est des musiques qui filent droit, propulsées par des moteurs à deux temps. La musique du train, la musique de la machine, la musique conquérante ; binaire et inflexible. Et il y a des formes qui ne jouent pas le jeu. Musique bancale, musique qui frotte avec la justesse, musique arythmique : des musiques qui, en s’inventant, créent leurs propres conditions d’existence. Celles-ci engendrent parfois les inventions poétiques. La plupart du temps, elles passent inaperçues.

Dans la pénombre de l’auditorium de l’Institut suédois de Paris – c’était il y a plus de dix ans –, Mariam Wallentin et Andreas Werlin fomentent une partition très personnelle. Un accompagnement sans notes ni harmonie, inscrite nulle part ailleurs que dans leur désir de création. Elle chante, il joue de la batterie et de quelques ustensiles. « Nous ne jouons pas de la musique suédoise », disent-ils quand on leur demandera de parler de Wildbirds & Peacedrums. Elle a une grosse voix qui lui a valu de se distinguer dans la sphère « jazz vocal ». Ils se sont rencontrés à l’Académie de musique et d’art dramatique de l’Université de Göteborg, se sont mariés quelques mois plus tard. La foudre est tombée d’un coup.

Quand vient “I Can’t Tell in His Eyes”, Mariam Wallentin égrène une sorte d’autoharp ou d’instrument traditionnel lapon, on ne saurait dire. Wildbirds & Peacedrums change de registre. Place à la ballade à la nuit tombée, une retraite aux flambeaux longeant un lac gelé. Le titre figure sur le premier album du duo, “Heartcore” (2007), publié par le label Leaf. La réécoute confirme l’impression laissée par la prestation live : cette musique ne tourne pas rond.
Tandis qu’Andreas Werlin plante le climat, les arpèges de la harpe sont à la traîne, ricochant en écho ; magnifique queue de comète. Par là-dessus, le chant long et rêvé de Mariam Wallentin oscille entre invocation et oraison. Il semble qu’il soit question de son père. Puis la chanson connaît quelques paliers qui la conduisent plus haut encore. Belle effusion ascensionnelle…

Après quatre albums inégaux, on perd la trace de Wildbirds & Peacedrums vers 2014. Il semble cependant que le duo ait donné quelques concerts çà et là depuis. On les retrouve aussi dans d’autres projets, dont Mariam The Believer pour la chanteuse et le trio Fire! (Villette Sonique, 2018), en ce qui concerne Andreas Werlin. Puissent-ils un jour ressusciter le feu et la magie !

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