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Oasis et les frères Gallagher : une histoire d’Angleterre en dix vidéos

La musique d’Oasis et les frasques des frères Gallagher ont marqué les années 90 et 2000. Alors que Noel et Liam poursuivent séparément leur carrière avec succès, et qu’une reformation ne semble toujours pas à l’ordre du jour – même si l’hypothèse est régulièrement évoquée –, un livre revient sur l’histoire du groupe et de ses deux figures de proue en la replaçant dans un contexte plus large, celui de la Britpop et de la société britannique de l’époque en pleine renaissance culturelle (la fameuse “Cool Britannia”). Dans “Oasis ou la revanche des ploucs”, publié par l’excellent éditeur Playlist Society, Benjamin Durand et Nico Prat montrent qu’à travers l’irrésistible ascension des Mancuniens (qui marquera toutefois le pas après un troisième album boursouflé), c’est toute une jeunesse délaissée, issue de la classe ouvrière, qui a retrouvé sa fierté. Mais la force des chansons de Noel Gallagher aura été de parler à tout le monde, à l’instar de celles des Beatles qui les ont tant influencés. Pour retracer cette épopée souvent glorieuse et drôle, parfois pathétique, nous avons demandé aux deux auteurs une sélection chronologique de dix morceaux et séquences vidéo d’Oasis, Noel ou Liam solo, raretés ou moments fameux allant de 1992 à 2019. On retrouvera dans leurs commentaires leur rapport très personnel à Oasis – qui n’empêche pas le sens critique – et toute l’érudition jamais pédante qu’ils ont mise dans leur livre. Des histoires de rock’n’roll stars qui n’ont au fond jamais oublié d’où elles venaient.


1. Oasis – Snakebite (1992)

Benjamin Durand : « Un morceau pas vraiment poussé plus loin et qui n’existe pas dans la discographie officielle. On reconnaît toute l’influence acid house et Madchester dans le côté transe et répétitif du motif. Ça ressemble pas mal à “Columbia”. »
Nico Prat : « Une véritable rareté que j’aime beaucoup, et qui aurait mérité une existence en live, en ouverture des concerts par exemple, comme ce sera le cas pour d’autres titres instrumentaux, “Swamp Song“ et “Fuckin’ in the Bushes”. »


2. Oasis – All Around the World (Test In Boardwalk, 1992)

Benjamin : « On voit sur cette belle archive à quoi ressemblait le local de répétitions d’Oasis au Boardwalk. Il se situait au sud-ouest du centre-ville de Manchester, en face de l’Haçienda. Cette chanson n’est sortie officiellement que sur “Be Here Now” (1997), le troisième album. Noel disait que dès 1992, il souhaitait l’enregistrer avec un orchestre et il a voulu attendre d’avoir les moyens pour ça. On voit les posters des Beatles dans la salle, ce n’est pas un cas particulier. Au début des années 2010, quand je vivais à Manchester, j’y ai fréquenté des groupes qui avaient un unique poster dans leur salle de répétitions : les Beatles. Ces groupes ne vénéraient pas particulièrement les Fab Four, mais pour eux ils ont ouvert la voie vers un succès global possible à des groupes du nord de l’Angleterre. »
Nico : « Il est aussi marrant de les voir ici répéter une version brute de cette chanson, qui deviendra plus tard, une fois qu’ils auront les moyens de leurs ambitions, très longue et très orchestrée. Ce single est vraiment un pont entre les débuts et la gloire. »


3. Oasis – Wonderwall (Noel solo) et Roll With It (Nulle Part Ailleurs, 22 novembre 1995)

Benjamin : « Souvenir personnel du début de mon intérêt sincère pour Oasis. Tout d’un coup, tu vois à la télé un groupe que tu n’es pas prié d’“admirer”, juste des mecs avec qui tu pourrais être pote, qui traduisent une mélancolie/frustration/euphorie universelle sur de super mélodies. C’était la première fois que j’entendais “Wonderwall”, un choc. J’ai mis du temps à m’habituer à la version Liam après ! Sinon, “Roll With It” est sans doute le single le plus faible de la première période. »
Nico : « On en parle dans le livre : dans le clash des singles avec Blur à l’été 95, ils sortent “Roll With It”, qui fonctionne très bien en live mais reste effectivement un titre un peu faiblard. D’autant plus qu’ils ont, sur le même album, “Wonderwall” et ”Don’t Look Back in Anger”. Une preuve parmi tant d’autres que cette rivalité n’avait sans doute pas grande importance pour eux. »


4. Oasis – Round Are Way (Live Earls Court, 1995)

Benjamin : « J’ai beaucoup de tendresse pour cette face B bordélique de “Wonderwall”. C’est le titre préféré de tous les fans de post-rock puisque le mec qui se tape un délire à l’harmonica a joué sur “The Colour Of Spring” et “Spirit Of Eden“ de Talk Talk : Mark Feltham. »
Nico : « J’ai découvert ce titre par “Une vie moins ordinaire”, film mal-aimé de Danny Boyle [mais à l’excellente BO, NDLR] dans lequel le personnage d’Ewan McGregor ne cesse de le fredonner. Il aurait dû figurer sur la compilation de faces B “The Masterplan”. »


5. Oasis – Brit Awards Uncut, Earls Court, Londres (19 février 1996)

Benjamin : « Déjà, cette vidéo devrait faire office de message de prévention contre la cocaïne pour dire “La drogue, c’est mal”. Ensuite, c’est la consécration un an après que Blur a raflé toutes les récompenses alors que Oasis n’avait obtenu que celle de “meilleur espoir”. Damon Albarn avait alors dit sur scène vouloir partager le trophée de meilleur groupe avec Oasis. Il dit regretter d’avoir dit ça dans le doc de 2009 sur la reformation de Blur… Tout est drôle dans cette cérémonie car on voit la vieille garde un peu ringardisée par les prolos de Manchester : Michael Hutchence d’INXS, Lenny Kravitz, Pete Townshend. Et puis le discours final de Noel, dont on parle dans le livre, où il fait la promo de Tony Blair. »
Nico : « L’année d’avant, Noel Gallagher, petit con, prend le micro pour affirmer que les has beens d’hier ne devraient pas remettre de prix aux rock stars de demain. Michael Hutchence, qui est sur scène à ses côtés, ne dit rien. Il en pleurera. Il faut voir le doc “Mystify : Michael Hutchence”. Bouleversant. »


6. Oasis – The Swamp Song/Acquiesce (Manchester, avril 1996)

Nico : « On comprend beaucoup de choses sur le groupe en regardant la VHS de “There And Then” ».
Benjamin : « Voici le début de la deuxième date à Maine Road, le stade de Manchester City de l’époque. Ils commencent ce concert en stade par deux faces B. L’entrée de Liam sous les ovations est magique, avec ce survêtement Umbro. Je pense à deux copains de Manchester, Noel (pas le même) et Pete, qui y étaient. Tous les deux étaient et sont toujours des supporters de Manchester United. »


7. Oasis – Be Here Now (live Earls Court, 1997)

Benjamin : « La démesure du Oasis de 1997 en images, avec la mise en scène un poil too much. La chanson souffre de tous les défauts de l’album mais elle a quand même un sacré groove. Et Liam est impérial. »
Nico : « L’un des meilleurs morceaux du disque selon moi. »


8. Oasis – The Masterplan (2006)

Benjamin : « Comme nous le rappelons dans le livre, le graphisme du clip est inspiré du peintre de Salford L. S. Lowry, qui faisait des tableaux de la population de Manchester dans le cadre industriel suffoquant de son époque (le milieu du XXe siècle). Il y a là tout le décor qui a façonné l’imaginaire des Gallagher : les usines, le foot, les ballrooms, les week-ends à Blackpool… »
Nico : « Et puis “The Masterplan”, encore une face B géniale… Noel lui-même dira qu’elle aurait dû être une face A. »


9. Noel Gallagher – Oasis DVD commentary highlights (2011)

Benjamin : « Sans sous-titres, il faut faire un effort de compréhension, mais en gros, Noel raconte qu’il déteste tourner des clips, trouve que ça ne sert à rien, critique des réalisateurs qui le filment en train de marcher au ralenti en croyant faire “Apocalypse Now”. Dans le clip de “Supersonic”, il trouve qu’il ressemble à “fockin’” Columbo, dans celui de “Whatever”, il raconte qu’il avait la gueule de bois. »


10. Liam Gallagher – Once (vidéo officielle avec Eric Cantona, 2019)

Benjamin : « Noel a décrit ainsi cette chanson de son frère : “Elle s’intitule Once, ce qui équivaut au nombre de fois qu’elle mérite d’être écoutée”. Très vilain. Une bonne illustration de la nouvelle carrière solo de Liam qui connaît le succès. Et là, lui et Canto jouent sur tous les codes de la persistance des classes sociales dans la société britannique. Joli symbole de l’union des étendards de City et United. »
Nico : « Liam a réussi ce tour de force : il était déjà le frontman, la gueule, il est désormais l’héritier d’une tradition pop, et le véritable auteur d’une nouvelle carrière, quand son frère, lui, tourne le dos à la sienne. »

Photo : Jill Furmanovsky/Elite Film.


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