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Other Lives – Tamer Animals

Other Lives - Tamer Animals

A la découverte de « Tamer Animals », deuxième œuvre (oui, on se permet le mot) d’Other Lives, il est difficile de savoir s’il on est là en présence d’une création du futur ou du passé tant l’album semble intemporel. Entre post-rock orchestral et bande originale d’un western d’anticipation, ce quintet d’Américains s’amuse à brouiller les pistes en composant une musique à la croisée des chemins entre indie rock et classique. La faute probablement à son fondateur historique et leader, Jesse Tabish, musicien multi-instrumentiste surdoué, et dont les références assumées sont à chercher à la fois du côté de Godspeed You! Black Emperor et Sigur Rós.

Tout à la fois ambitieux, intime et organique, « Tamer Animals » se compose de 11 morceaux (10 chansons et 1 instrumental final) qui racontent chacun une histoire, une scène pourrait-on dire, mais dont la succession dessine un panorama grandiose. La richesse de l’instrumentation crée autant de points de vue, d’angles, de mouvements de caméras qui tissent la trame du film imaginaire dont cet album serait la bande originale. Cordes, cuivres, vents et percussions, c’est presque un orchestre classique entier que les natifs de Stillwater ont convoqué pour soutenir le songwriting narratif du groupe. Le plaisir de l’écoute est à la hauteur de la réussite de ce second opus.

Tout commence par « Dark Horse », titre qui plante immédiatement le décor : vagues de trompettes, de cordes, de basson et de percussions se croisent et s’entremêlent pour former une chevauchée fantastique qui fait autant penser à une partition de Saint-Saëns qu’à un morceau de rock. Vient ensuite « As I Lay My Head Down » dont la richesse de la mélodie et des chœurs n’est pas sans rappeler leurs illustres confrères Midlake. Pour ce titre comme pour « Old Statues » qui vient un peu plus loin, l’influence de Morricone est bien présente : il résulte de ces deux morceaux une force d’évocation et une émotion assez incroyables pour des morceaux de ce format.

Il est d’ailleurs à noter que l’ambition de la composition n’a pas eu pour conséquence d’allonger les morceaux jusqu’à l’ennui ou l’écœurement : pas un titre de « Tamer Animals » ne dépasse les 5 minutes. La justesse et la force du « discours » résident donc également dans sa concision. « Chaque son a sa raison d’être ». C’est Tabish qui le dit lui-même et on veut bien le croire !

Le groupe revendique également l’absence de single sur leur album. « For 12 » en a pourtant la stature et l’importance. C’est le chef d’œuvre qui ouvre la voie à la découverte des 10 autres titres de « Tamer Animals ». Comme « Roscoe » permettait l’adhésion immédiate à « The Trials Of Van Occupanther » tout en sachant s’effacer par la suite, « For 12 » justifie à lui seul la découverte du second album des Américains. Épique, fascinante, la chanson hypnotise par son rythme lancinant et ses nappes de violon suaves. Déjà un classique absolu.

Viennent ensuite plusieurs morceaux plus sombres. Le morceau titre « Tamer Animals » qui fait immanquablement penser à The National, « Dust Bowl III » à la sobriété maîtrisée ou « Weather » à l’inquiétante étrangeté. « Woodwind Loop » marque une pause dans l’intensité du récit musical. Respiration salvatrice à l’orchestration pléthorique et dont le titre (littéralement boucle d’instrument à vent) est à prendre au premier degré !

C’est ensuite au tour de « Desert », autre sommet de l’album, autre instrumentation que n’aurait pas reniée Morricone, avec sa mandoline et ses cordes anxiogènes…  Presque 4 min 30 de virtuosité mélodique. Tout se termine comme cela avait commencé près de 40 minutes plus tôt : entre les cuivres, les vents, les cordes et les percussions, autant d’entités organiques qui auront partagé la vedette avec le groupe lui-même et qui auront fait de ce « Tamer Animals » une œuvre somptueuse, épique, indispensable et qui sait éviter tous les excès pour ne garder que la grâce. Déjà l’un des tout meilleurs albums de cette année 2011.

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