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Disques

Soltero – Hell Train

SOLTERO – Hell Train
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SOLTERO - Hell TrainAu début, on ne voit pas trop où roule ce train d’enfer qu’on est censé prendre en marche. Ca commence bien gentiment, sur une délicate association de guitare acoustique et de voix dont on aurait pu trouver un agréable écho au détour d’un disque des doux dingues de Gorky’s Zigotic Mynci. L’auditeur est alors mis sur les rails d’un album au folk caressant, soyeux, aux mélodies faciles. Mais ça dérape assez vite ; dès le deuxième titre en fait, où on change déjà de ligne, électrique cette fois : la guitare, la basse et la batterie s’en donnent toutes trois à cœur joie pour faire rejaillir un fond d’énergie 70’s à la surface pendant les quelques secondes d’intro de « The Prize ». Et c’est plus loin encore dans le temps qu’on s’arrête à la « Station », où l’on tombe directement sur l’esprit à l’œuvre dans les compositions des Beach Boys. Et oui, malgré les mises en garde répétées de nos chers professeurs de philosophie de terminale, difficile de ne pas avoir recours ici à un catalogue de références éparses pour rendre compte du disque autrement que par métaphores oiseuses. Car l’itinéraire adopté par Soltero est bien loin de la ligne droite, et les chansons sont autant d’étapes vers divers aspects de la pop que le groupe semble prendre un malin plaisir à explorer, d’une plage à l’autre du disque, avec une habileté du reste assez déconcertante. Certes on peut globalement parler de folk (multiforme et extensible à volonté) pour donner les cadres généraux à ce recueil de chansons, si on tient vraiment à les mettre en cage. Mais c’est probablement justement ce qu’a cherché à éviter Soltero. Si la section rythmique maintient le plus souvent un fond typiquement américain sur chacune de ces chansons, le folk en question oscille de la ballade nuageuse au piano (« Acadian Coast ») à la dérive noisy de « Ghost at the Foot on the Bed ». Finalement, un peu comme dans certaines de nos vieilles dissertations encore une fois, la cohérence de l’ensemble tient plus à la conclusion, impeccable petite perle acoustique, toute ramassée dans son efficacité mélodique, qui évoque le génie de Paul McCartney en la matière (et notamment la chanson cachée à la fin d' »Abbey Road »). Entre le point de départ et l’arrivée, le train aura parcouru bien du chemin, faisant halte dans tous les patelins perdus rencontrés sur la route, et donnant de la sorte à chacun des musiciens ambulants l’occasion de s’exprimer à fond, jusqu’à faire exploser tout à fait la structure initialement prévue pour certains morceaux (« Bleeding Hearts »). D’un titre à l’autre, la voix du chanteur peut, elle aussi, se métamorphoser, et se faire artificiellement grave, naturellement aiguë, naturellement grave, parfois aussi artificiellement aiguë, comme pour mieux brouiller les pistes et donner du fil à retordre à l’auditeur. Le meilleur exemple de cet imbroglio musical en est sans doute le moment où la locomotive se fait braquer sur « Hand Up », qui commence comme pourrait le faire une chanson de Belle & Sebastian, se poursuit comme du Silver Jews, pour s’achever dans un feu d’artifice d’une flower pop sixties, désarmante d’authenticité. Mais arrêtons là les références. Et espérons plutôt que vienne un jour, prochain, où Soltero en devienne une à son tour.

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