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Charlotte Gainsbourg – IRM

CHARLOTTE GAINSBOURG – IRM
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CHARLOTTE GAINSBOURG - IRMViolon d’Ingres moderne, le disque d’actrice est souvent traité avec une déférence de bon aloi que tempère rarement une pointe de raillerie. C’est que, selon la phrase définitive de Richartd Burton, une actrice est un peu plus qu’une femme alors qu’un acteur est un peu moins qu’un homme. On verra bien peu de comédiens se commettre dans le chant enregistré, et il n’est point dit que le disque finalisé ne soit une façon de rendre ces déesses de l’écran bêtement et platement humaines (voir la sublime Scarlett Johansson desservie par un "Anywhere I Lay My Head" inconséquent).

Le cas Charlotte Gainsbourg est somme toute plus intrigant ; excellente actrice, son registre principal – la bonne copine qu’on ne remarque pas du premier coup – n’en fait pas à proprement parler un objet de vénération érotique. Victime d’un premier symptôme infusé par Air, l’exsangue "5:55", Charlotte revient bien loin de l’image vaporeuse/molle de cet ectoplasme light comme une tisane bio. En quête de nouveaux horizons, elle a confié les rênes de producteur à Beck, et "IRM" donne à admirer aussi bien les principales qualités de ce musicien (fantaisie, versatilité, aisance mélodique) que ses défauts les plus flagrants (platitude dans la révérence, absence de profondeur). L’album est toutefois très plaisant et, par moments, quasi une révélation comme sur "IRM" happé par une section rythmique à la fois énorme et subtile. Parcourant le spectre musical, Beck plonge Charlotte Gainsbourg dans des univers a priori bien éloignés de la fille de son père. "Heaven Can Wait", duo réglementaire, brinquebale joliment comme un vieux Kinks des familles, tandis que "Dandelion" bluesifie juste ce qu’il faut. Plus près de nous, les accolés "Trick Pony" et "Greenwich Mean Time" s’aventurent avec succès sur les terres du dernier Kills. On avouera moins de passion pour les hommages redondants au pater, qu’ils soient directs via cordes, percussions et emprunts poétiques ("Voyage","La Collectionneuse") ou par la bande ("Le Chat du café des artistes," reprise de Jean-Pierre Ferland, mystérieux Canadien qu’il faudra visiter). A tout prendre, si l’on se languit d’un héritage gainsbourien, mieux vaut ses arrangements copiés à l’identique qu’épouser le tour d’un esprit si souvent déplaisant (ah ! ce cocktail frelaté de dandysme, donjuanisme et détestation de soi qu’a réinitialisé récemment "La Superbe", nouvel album de Biolay vanté partout au-delà du tolérable). Parenthèse fermée, je reviens vite à "IRM", disque varié, éclaté, sans réelle cohérence sinon celle de prendre des masques, de jouer à la chanteuse, aux chanteuses folk, country, pop, de répertoire, et j’en passe. Limitée mais de plus belle eau que Jane B, la voix prodigue ici ou là des éclats qui donnent envie d’y revenir : le charme assurément – qu’on se souvienne de l’unique belle scène de "Persécution" où en conversation téléphonique avec Romain Duris, elle l’apaisait de son seul timbre voilé et doucement intime. Chanteuse ou actrice, Charlotte Gainsbourg crée naturellement de l’intimité avec l’auditeur et le spectateur, ça n’est pas rien. En bref, "IRM" mérite qu’on s’y attarde en remisant ses a priori.

Christophe Despaux

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A lire également, sur Charlotte Gainsbourg :
la chronique de « 5:55 » (2006)

Master’s Hand
IRM
Le Chat du café des artistes
In the End
Heaven Can Wait
Me And Jane Doe
Vanities
Time of the Assassins
Trick Pony
Greenwich Mean Time
Dandelion
Voyage
La Collectionneuse

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