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Disques

Verone – La Percée

Verone - La percée

« La Percée » le bien nommé. En effet, ce troisième disque du duo français Verone n’est pas une simple confirmation d’un univers à nul autre pareil. C’est aussi l’oeuvre d’un groupe au sommet de son art. Revenu dans le giron de son premier label Martingale, le groupe signe dix titres, et autant de facettes d’une chanson française aux horizons infinis, qui charme avec un bonheur constant.

On passe par tous les états en écoutant ce disque, subtil, riche, qui se fait aussi langoureux. Dès « La Vallée », le décor est posé. Pas figé, mais bien affirmé : grands espaces, il laisse respirer, et par conséquent s’étirer les chansons, les textes, et la forme particulièrement soignée. Sammy Decoster vient en renfort donner du répondant à l’imagination de Verone (déjà bien perceptible sur « La Fiancée du crocodile« ). Les textes sont ainsi servis par une forme magistrale, tour à tour très présente et plus discrète.

Mais ce sont bel et bien les textes qui représentent l’ADN du duo. Il n’est pas rare que les larmes se mêlent aux sourires au détour d’une chanson (« Bleu » est à la fois décalée, éthérée et déchirante), mais ce n’est jamais pesant car il y a cette élévation, cette élégance qui caresse l’auditeur sans le ménager. Il faut en effet tendre l’oreille pour entendre les subtilités (dans les mots comme dans les mélodies), comprendre le décalage permanent, les tiroirs et les jeux sur les mots (« Fêlée mon gars ta coque » est un régal à plus d’un titre). Les thèmes de la beauté, de l’apparence et de la vieillesse reviennent souvent, avec ce côté cru et féroce (« Vieille peau »), mais aussi une tendresse qui affleure (« Mamie »), quand ce n’est pas l’humour qui revient (« Fish pédicure », entre durillons, dents de poisson et eczéma vaut son pesant de cacahuètes, tout comme « Quand même » avec ses persiflages). Mais la saveur des textes vient de la poésie qui s’en dégage.

Celle-ci ne s’exprime jamais mieux que dans les passages les plus folk, où l’on retrouve l’aspiration des troubadours de Verone, qui errent sur « La Vallée » et hurlent avec les loups, quand ils ne cherchent pas « la percée », figure métaphorique d’un passage qui se dérobe tout le long d’une chevauchée haletante. Le duo ose même déclamer sa flamme à « Izenah » (surnom de l’île aux Moines où a été enregistré le disque) tout au long d’un texte qui s’évade aussi loin que la mélodie. La forme est donc une fois de plus totalement au service du chant de Fabien Guidollet, dont la présence vocale est toujours aussi forte.

Alors oui, Verone n’est pas des plus simples à cerner. Mais n’est-ce pas là la marque d’un groupe précieux, qui sait se rendre joyeusement unique car totalement en décalage ? On leur souhaite de garder ce décalage et de continuer à nous narrer des histoires : celles-ci sont trop belles pour que l’on puisse s’en passer.

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