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Disques

Goldfrapp – Tales of Us

Goldfrapp - Tales of Us

S’il est un reproche que nous ne pouvons faire à Goldfrapp, c’est bien celui de l’immobilisme. Avec son parcours discographique en dents de scie, le duo britannique s’est positionné au fil des années comme l’une des figures les plus insaisissables de la scène contemporaine. Difficile, en effet, de jurer fidélité à un groupe qui n’a jamais su choisir entre les deux versants foncièrement ambivalents de son univers musical. Entamée sous les meilleurs auspices par l’élégiaque “Felt Mountain” (2000), la carrière de Goldfrapp n’aura par la suite que très rarement retrouvé les vapeurs enivrantes de cet insurpassable galop d’essai.

Plutôt que de creuser avec obstination un seul et même sillon electro-mélancolique, Alison et son camarade Will Gregory se sont trop souvent risqués à accoster d’autres rivages nettement moins praticables. Dès “Black Cherry”, deuxième album paru en 2003, Goldfrapp déconcertait une partie de son auditoire en se vautrant sans retenue dans une electro-pop discoïde amputée de toute délicatesse. Incapable dès lors de choisir entre deux tentations stylistiques a priori inconciliables, la paire avait fini par épuiser une bonne partie du crédit que nous continuions malgré tout à lui accorder. Les plus endurants d’entre nous verront enfin leur patience récompensée, le cru 2013 optant pour un retour aux ambiances cinématographiques vertigineuses des origines.

Derrière un cliché de pochette au noir et blanc intrigant se dissimulent une dizaine de chansons recueillies qui renvoient à leur façon au “Out of Season” de Beth Gibbons & Rustin’ Man, autre grand disque automnal vers lequel le coeur nous ordonne régulièrement de revenir. L’automne, saison idéale pour se perdre dans ce “Tales of Us” au sein duquel cordes, pianos et guitares tissent un canevas sonore propice aux rêveries les plus poétiques. Le chant brumeux de la maîtresse des lieux, bien que parfois un peu perdu dans le mix, agit lui aussi comme un véritable sortilège. Plus captivant que jamais, il est le véritable fil rouge du disque, portant à bout de bras des merveilles comme ”Annabel”, la majestueuse “Drew” ou encore un “Stranger” aux orchestrations dignes de John Barry.

Pris au piège par cette succession de saynètes profondément hantées, nous n’aurons d’autre choix que de nous laisser ensorceler, trop heureux de voir Goldfrapp voler de nouveau à de telles altitudes. Profitons donc pleinement de ce sixième album intimiste, synonyme de retour sans doute temporaire aux choses sérieuses : nos deux amis regagneront bien assez vite cette satanée piste de danse…

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