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Concerts

John Davis, Larry’s Corner, Stockholm, 24 mars 2019

Quand John Davis se met dans un coin du Larry’s Corner, il s’excuse de devoir se livrer à l’exercice tant honni par lui auparavant : le chant a capella, mais ses bagages ont été perdus par sa compagnie d’aviation. Il se débrouillera avec une guitare qui traînait par là et quelques samples balancés dans un ampli peu adéquat. Lo-fi jusqu’au bout, hippie post-baba avec collier de bois (bouddhiste ?) autour du cou, il enchaîne titres récents (« El Pulpo ») et quelques-uns tirés du répertoire de The Folk Implosion. Pour introduire « Coca-Cola » (de la cocaïne aux écoles publiques soudoyées en passant par les divers soutiens aux dictatures : tout un programme), il nous raconte une amusante anecdote au sujet d’un T-shirt au logo d’Inca Kola (un soda péruvien), ramené d’Amérique du Sud par Peter Hughes, personnage étonnant. On apprend au passage (John est comme ça, il balance les copains et n’a pas peur du retour des chasses aux sorcières) que Peter est, comme John, communiste, et qu’en dépit de son engagement politique, il a une passion pour les voitures. Difficile de trouver un autre ami partageant ces deux passions et pourtant… il en trouvera un dans la personne du directeur d’une célèbre revue américaine consacrée à la bagnole, qui lui confiera un emploi. C’est donc lors d’un reportage dans un pays sous-développé sur je ne sais quel 4×4 que Peter rapporte pour son ami un T-shirt Inca Kola. Plus vraiment un symbole (capitaliste) de la résistance à l’impérialisme de la bande à Pemberton, puisque Inca Kola appartient désormais à la Coca-Cola Company. Bref… Comme les instruments de John, et les cassettes de chez Shrimper, le T-shirt est invisible pour nous ce soir, perdu dans les no man’s land aéroportuaires…

A part ça, John triture ses samples, distord tout ce qu’il touche (ce qui n’empêche pas un nos voisins, fort âgé, de s’endormir sur sa chaise), attaque la production et les marchés du maïs, de la banane ainsi que leur impact sur les populations et l’environnement (« Sugar Daddy Candy Corn » et « El Pulpo ») puis laisse la place à son copain-collègue rappeur exilé en France, Mike Ladd (superbe show avec samples… sur téléphone). Il faudra qu’on l’interpelle au passage pour ne pas laisser passer l’occasion de lui demander de nous jouer “I’ll Burn”. Ce qui nous permet de penser à Stanley Brinks, alors André Herman Düne, qui nous avait conseillé d’écouter ce titre. C’était il y a fort longtemps, Madame Michu… John s’exécute sans se faire prier, assez surpris qu’on lui fasse cette demande pour la seconde fois (sans doute un aficionado présent au Pop In la veille à Paris). 

Pendant que Mike Ladd branche son smartphone dans la sono, on papote avec John et on achète l’un des plus fascinants objets sonores jamais vus : « Outside a Small City » sur le label italien Almost Halloween Time Records. Soit des bribes d’improvisations guitaristiques et autres bidouillages (sympathiques mais un peu anecdotiques tout de même) collant avec l’ambiance morne des banlieues des petites villes américaines. Le plus fabuleux, c’est la marque de fabrique de Almost Halloween Time Records : des mini-éditions (ici 300 exemplaires en LP) avec couvertures peintes à l’huile (ou dessinées) à la main ! Chacune des pochettes de « Outside a Small City » est ainsi la peinture d’une photo unique prise par John liée à une anecdote qu’il raconte avec plaisir à la petite quinzaine de spectateurs présents, tout en se demandant comment il va gérer son retour à l’école après sa tournée.

Si c’est pas beau et généreux ça… 

À la prochaine, John, et hasta la victoria siempre !

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