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Disques

Six Organs of Admittance – The Veiled Sea

“The Veiled Sea”  est l’album improbable de Six Organs of Admittance. Alors qu’on croyait tout savoir de notre Ben Chasny préféré, il prend la poudre d’escampette, une fois de plus, et fait le pont entre new wave, ambient, kraut et hard rock vintage. Et on ne ressort ivre de bonheur et la tête retournée.

Un bon disque de Six Organs of Admittance est un disque qui ouvre des portes, qui libère l’esprit et déchaine le corps. Un bon disque de Six Organs est un objet intellectuel qui touche au fondements de l’intime. Avouons-le, ça faisait longtemps qu’on n’avait pas été remué par un disque de Six Organs. On retrouvait bien çà et là ce qui nous avait fait basculer à jamais dans l’adoration mais pas de quoi retrouver le coup de pied au cul de “School of the Flowers” ou de “Thousand Birds” sur “Dark Noontide”. 

C’est tout de même cette image qui vient nous frapper à l’écoute de “The Veiled Sea” paru discrètement sur Three Lobed Recordings cet été. On est tout à fait déconcerté par ce retour aux percussions free qui ouvrent “Local Clocks”, comme un écho de Corsano piraté par un Fennesz, le tout sur des orbes de claviers basses qui nous rappelle feu Berg Sans Nipple. Comme cela commence bien… Et puis ça ne va nulle part. Ce n’est qu’une sorte d’ouverture vers des claviers répétitifs inouïs chez Chasny, émaillés de quelques grattouillis avant… une explosion de solo de guitare comme on les aime : gras, stridents, rêveurs. Et là on part. On voyage vraiment. Ce qui accroche, ce n’est pas la guitare de Chasny qu’on connaît par cœur mais son agencement dans quelque chose de vraiment nouveau dans la galaxie Six Organs. C’est planant et électrisant.

Et le voyage ne s’arrête pas là. Une boîte à rythmes surgit pour enclencher sur un funk rock des familles, plombé par une basse massive. Pas besoin de chercher loin, Ben Chasny, métallurgiste sans œillères, zieutait vers le guitariste George Stevens, idole de nos jeunes années : le guitariste de Billy Idol mais surtout celui de “Dirty Diana” de Michael Jackson et, aussi, responsable du riff de Top Gun.

D’où ce méta-rock, remontée magmatique culturelle, qui dégouline sur la musique électronique, en posant des soli diaboliques sur des restes de krautrock. C’est bluffant.

“Old Dawn” reprend les atmosphères aqueuses, vagues sur vagues des musiques pour insomniaques de “Sleep Tone” (parues sur son label Hermit Hut).

Comme un reflux, “Last Station Veiled” rembarque sur des ondes sombres et tranquilles (presque les mêmes qu’arpentaient Songs:Ohia dans ces derniers albums). La voix resurgit avant un solo qui déchire tout, habité, puissant, violent, sauvage, criard. On ne sait plus sur quel pied danser. C’est si doux et si cinglé. Et ça dure.

Nouveau contre-pied au cul, une reprise de Faust, “J’ai mal aux dents”. Rythmique impeccable sur dérapages vocaux et guitaristiques. C’est fou, totalement ahurissant avec une guitare non pas bavarde mais conteuse, chamanique.

On est totalement soufflé, sans cesse enthousiasmé par les détours que prennent le disque. On retrouve toute la spontanéité de Chasny, l’envie d’en découdre, de livrer un disque brut mais fidèle reflet de son âme, de son jeu, de ses références, de ses marottes d’hier et d’aujourd’hui. 

“The Veiled Sea” n’est sans doute pas une pierre milliaire de son œuvre mais c’est sans doute son album le plus attachant et complet dans sa diversité livré depuis des années.

Avec l’aide de Dirty Johanna D. 

The Veiled Sea est sorti le 25 juin dernier chez Three Lobed Recordings.

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