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Mendelson – Personne ne le fera pour nous

MENDELSON – Personne Ne Le Fera Pour Nous
(Rec-Son / LiFe LiVe) [site] – acheter ce disque

MENDELSON - Personne Ne Le Fera Pour NousA Popnews, les avis sur Mendelson sont pour le moins tranchés : il y a ceux qui aiment, et ceux qui n’aiment pas. Et c’est bien, finalement, en ces temps d’unanimisme mou et de disques "vraiment pas mal" auxquels on ne revient plus après deux ou trois écoutes. Avec le fièrement titré "Personne ne le fera pour nous", ceux qui avaient déjà suivi les épisodes précédents retrouveront en tout cas ce qui fait de ce groupe un cas à peu près unique dans le paysage musical d’ici, en premier lieu ces paroles obsessionnelles qui racontent l’aliénation ordinaire, la folie, la haine, l’ennui, la fatigue de vivre, le vide, le rien. Ce n’est ni vraiment du rock (bien qu’il y ait des guitares, parfois bruyantes), ni vraiment de la chanson (car les morceaux sont plus parlés que chantés, avec ce phrasé à la fois percutant et étrangement désaffecté), ni vraiment de l’expérimental pur et dur. Ce qu’on a entendu de plus proche, c’est peut-être les regrettés Arab Strap – et ils étaient écossais.
Si les textes et la musique creusent toujours aussi profond, parfois jusqu’au malaise ou au rire nerveux, ce double album, lui, revient de loin : terminé à l’hiver 2005, il a tellement intéressé une industrie du disque en pleine déliquescence que Mendelson a finalement décidé de se passer de ses services et de le vendre sur son site en téléchargement et en CD, au packaging sobre et soigné.
S’il fallait ne retenir qu’un seul titre de ce disque monstre, démesuré, hors format (90 minutes sur deux CD, des morceaux qui ne veulent pas finir), ce serait peut-être "1983 (Barbara)", le plus long justement avec ses 11 minutes et demie. Ce prénom et cette date peuvent faire penser aux "Filles de 1973", l’une des rengaines les plus agaçantes de Vincent Delerm – chanteur souvent estimable par ailleurs, et portant un prénom sympathique. Ce que raconte la chanson n’est d’ailleurs pas très éloigné : des souvenirs d’enfance et d’adolescence, qui à travers une accumulation de détails très concrets touchent à l’universel, comme si c’était un peu notre histoire qui était racontée. Mais là où Delerm cherchait la connivence avec l’auditeur en déroulant des références en forme de clins d’œil, Pascal Bouaziz ose la première personne, dans un récit où l’on ne sait plus très bien ce qui est réel, imaginé, autobiographique, réinventé, fantasmé – et après tout, qu’importe. On est plus près au fond du très beau "Rue des Marais" de Dominique A, mais sans le mystère poétique, les brumes de l’évocation : ici, les souvenirs s’écoulent comme si l’on avait crevé un abcès, en une logorrhée que rien ne semble pouvoir arrêter.
On écoute ça avec une boule dans la gorge et les larmes aux yeux et on en sort terrassé, lessivé comme rarement. On se dit qu’on n’a jamais entendu un truc pareil, que Pascal Bouaziz, sans jamais faire de la littérature, est peut-être bien l’un des plus grands auteurs français contemporains, et qu’on ne peut décidément pas garder ça pour soi.

Vincent Arquillière

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