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The Saints – Interview

Dans un petit hôtel de la place Gambetta, Chris Bailey, en tournée européenne avec ses increvables Saints, finit sa journée promo (« Nothing is Straight in My House » est déjà dans les bacs). Sur la table, trois bouteilles de Bordeaux. Marty Willson-Piper, guitariste de The Church et nouveau membre provisoire du groupe, passe prévenir qu’il s’en va visiter Montmartre. Nous voilà seul avec l’un des meilleurs songwriters des antipodes, une icône du rock australien, voire du rock tout court. Jovial et bavard, le leader des Saints se fiche pourtant de son statut de légende vivante comme de sa première cuite. Interview fleuve d’un homme humble et chaleureux. Où il est question de blues, de poupées moches, d’Eglise et de Johnny Hallyday…

CHRIS BAILEY - THE SAINTS

Ton dernier album, « Spit the Blues out », sonnait très bluesy. Tu reviens aujourd’hui avec un album beaucoup plus rock, primitif, dur. Dans lequel de ces deux registres te sens-tu le plus à l’aise ?
J’ai fait « Spit the Blues out » pour Last Call (anciennement New Rose), après une converstaion après Patrick Mathé (patron du label), et après trois semaines d’enregistrement, je me suis dit que j’étais trop jeune pour faire un hommage au blues. Ça sonnait comme du mauvais Clapton, le petit blanc qui essaie de faire du blues. Du coup, j’ai essayé de mettre du R’n’B, car j’ai toujours pensé que les Saints étaient un groupe de R’n’B. J’ai donc écrit d’autres chansons. Ce n’est certainement pas notre meilleur album, mais c’est un hommage correct à un genre, car ça sonne comme ces disques que j’écoutais petit. Après « Split the Blues out », je voulais un disque pop, mais l’an dernier, on a fait un concert assez noisy à Amsterdam, très alternatif et grungy, et j’ai pensé : « j’aime ça », les filles en mini short qui criaient, et tout… Du coup, pas d’album pop bien poli. Ça n’était plus dans l’ambiance. L’air du temps est aux peurs, aux conservatismes, aux extrêmes droites. Je ne me sentais pas de faire un disque pop. Je ne suis pas un chanteur politique, mais face aux conservatismes de tous bords, j’ai pensé que ma modeste contribution devrait être bruyante.

Regretterais-tu tes disques plus pop et mélodieux des années 1980, comme « A Little Madness To Be Free » ?
Non ! Mais un artiste doit répondre à l’époque dans laquelle il vit, répondre à ce qu’il ressent. Et quand je me balade dans les rues aujourd’hui, je n’entends pas de violons, j’entends des guitares bruyantes. Le dernier album est le reflet de cette énergie. Je n’ai jamais voulu que les Saints soient un « pastiche cabaret » de ce qu’ils ont fait. A chaque fois qu’on joue, ça doit être comme la première fois. Il faut oublier le dernier album, écrire des chansons et les jouer. Idem en tournée : jouer chaque concert comme le premier. On est obligé car le public sent quand on ment.

Comment Marty Willson-Piper, guitariste de The Church, est devenu un Saint ?
Il a été canonisé ! Après avoir été à l’église (The Church) toutes ces années, il est devenu un Saint ! En fait, on se connaît depuis plusieurs années. L’an dernier, j’étais en tournée avec Nick Cave, et on jouait au même festival. On voulait faire quelque chose ensemble. Je lui ai demandé ce qu’il avait de prévu pour l’année qui venait. Il m’a dit : pas grand-chose. Je lui ai dit : alors, pourquoi pas devenir un Saint ? Et lui : d’accord ! Aussi simple que ça.

Et est-ce qu’un Saint pourrait entrer dans l’église The Church ?
Argh… je ne pense pas que The Church soit aussi flexible que nous ! On en rigole, mais pour nous cette collaboration est très logique : on a les mêmes sensibilités, les mêmes goûts (sauf que je n’aime pas le prog-rock) et j’adore ce qu’il fait. Je sais que la combinaison de nos deux styles peut paraître étrange, mais nos deux guitares se mélangent très bien.

The Church a une image si sombre, presque gothique, à mille lieues des Saints…
Les Saints ont aussi leur côté obscur… Marty définit The Church comme un groupe cérébral. Je pense que les Saints sont plus sexuels.

Tu as donc aussi collaboré avec Nick Cave sur « Nocturama » (duo sur « Bring it on »). Comment avez-vous été amené à travailler ensemble ?
Australian connection… Tout s’est fait très facilement. Il m’a appelé pendant l’enregistrement, je suis entré en studio, il y avait Blixa (prenant l’accent germanique) : « Hello Chris, on veut entendre ta superbe voix, prend un verre de vin ! ». Et Nick a joué et en deux heures, c’était bouclé. Très facile.

J’ai aussi entendu dire que tu avais collaboré avec Michael Hutchence.
Mmh… Il avait une maison dans le sud de la France, où on avait passé un peu de temps à composer tous les deux. J’ai laissé les bandes là-bas et je ne les ai jamais revues. Je ne sais pas où ça nous aurait menés. J’aimerais le savoir ! On était amis, et il me manque toujours beaucoup.

Penses-tu qu’il était sous-estimé ?
Oui, je le pense. INXS était un bon groupe de pop des années 80, mais sans Michael, sans son charisme et sans la dimension artistique qu’il apportait, cela n’aurait été qu’un groupe de pop funk moyen et n’aurait jamais connu autant de succès. Mais je ne devrais pas dire ça, je devrais leur souhaiter bonne chance !

Sais-tu que le reste du groupe a lancé un casting géant, retransmis à la télé, pour trouver un nouveau chanteur ?
T’as entendu parler ce cette merde ! J’ai bu un verre chez Andrew Farriss (clavier d’INXS) il y a quelque temps, mais après, quand j’ai entendu le lancement d' »A la recherche du nouveau Michael », j’ai perdu tout respect pour eux. C’était la chose la plus cynique et la pus abjecte à faire. S’il y avait un peu d’humour là-dedans, je pourrais en rire, mais Michael n’aurait jamais accepté ça. C’est juste de de la cupidité et de l’avidité, il n’y a rien d’artistique là-dedans. Pourquoi aller faire un nouvel album, prendre de l’argent à des Américains débiles pour faire du « Pop Idols » ? C’est pathétique. Ils n’ont même pas besoin d’argent.

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