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The Clientele – Strange Geometry

THE CLIENTELE – Strange Geometry
(Pointy / PIAS) [site] – acheter ce disque

THE CLIENTELE - Strange GeometryLe grand disque anglais de l’année a ceci de déconcertant qu’il est l’oeuvre d’un groupe faisant figure de magnifique anomalie dans le paysage musical britannique actuel, et ne surprend en vérité guère si l’on avait pris la peine de suivre jusqu’ici le parcours de ses auteurs. On peut ainsi avancer d’emblée que "Strange Geometry", à bien des égards, ne se démarque pas outrageusement de "Suburban Light" et "The Violet Hour", précédents disques des Londoniens de The Clientele. Il est pourtant le premier à dessiner les contours d’une identité aussi forte, à exister bien davantage en tant qu’album uni que par la grâce de chansons merveilleuses mais imparfaitement réparties.
A quels signes déceler l’envol souverain de cette pop jusqu’à présent souvent goûteuse, mais encore un peu verte ? D’abord au renouvellement discret de sa garde-robe sonore, qui joue clairement ici à plein : à l’apport des arrangements de cordes de Louis Philippe, donc, d’un classicisme aussi voluptueux que sobre (elliptique, au besoin) mais aussi à la matière vaporeuse qui enveloppe l’intégralité du disque, toute en arpèges de guitare saccadés et vocaux constamment brumeux. De la sorte, l’auditeur n’écoute jamais à proprement parler ces nouvelles chansons : il les contemple plutôt au travers d’une vitre constellée de gouttelettes de pluie permettant aux mélodies d’Alasdair McLean, immuablement semblables à des couchers de soleil orangés, de se muer en arcs-en-ciel sublimes. Mais à ce panorama enchanteur, le groupe parvient désormais aussi à adjoindre ce qu’il faut de fulgurances inattendues (le solo lézardé de "E.M.P.T.Y", digne du chef-d’œuvre de Michael Head avec les Strands, le spoken-words de "Losing Haringey") pour éviter l’écueil relatif d’une musique engourdissante à force de n’être "que" strictement belle. Les sources d’inspiration textuelles de The Clientele, elles, n’ont heureusement guère évolué (lire à ce sujet la passionnante genèse du disque ici). Toujours aussi riches d’influences littéraires, elles continuent de puiser dans la magie des architectures urbaines – et particulièrement celle des bords de la Tamise – la matière d’une verve singulièrement raffinée et poétique. Contrepoint idéal au dernier Woody Allen, "Match Point", ou au roman "Ainsi vivent les morts" de Will Self, tous deux dépeignant un Londres aujourd’hui exsangue et hanté par la (les) mort(s), "Strange Geometry" recrée ainsi, par l’équitable élégance de son propos et de sa forme, l’illusion d’une ville porteuse des fantasmes les plus romantiques et inaltérables.

Julien Espaignet

Since K Got Over Me
(I Can’t Seem to) Make You Mine
My Own Face Inside the Trees
K
E.M.P.T.Y.
When I Came Home From The Party
Geometry of Lawns
Spirit
Impossible
Step Into The Light
Losing Haringey
Six of Spades

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